Hassan Jarfi, son combat contre l'homophobie après le meurtre de son fils

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Douze ans après l'assassinat de son fils, Hassan Jarfi milite toujours activement contre l'homophobie. La sortie du film « Animals » a remis sur le devant de la scène son combat de père.

Hassan Jarfi et Sophie Davant dans l'émission « Mille et une vies » en 2017 - Capture d'écran France 2

C’est une affaire qui a glacé le sang de la Belgique mais surtout celui de toute la communauté LGBTQ+ : le 1er mai 2012, Ihsane Jarfi, 32 ans, est retrouvé mort, le corps nu abandonné dans la banlieue de Liège. Une semaine auparavant, aux abords du bar gay l’Open Bar, Ihsane s’interpose entre quatre hommes dans une voiture et la jeune femme qu’ils importunent.

Voulant les éloigner du bar, il monte avec eux. S’en suit une nuit atroce pour le jeune homme, frappé, insulté et violé pendant près de six heures, avant d’être laissé agonisant dans les champs. Un acte barbare d’une extrême violence, qui n’est pas resté impuni. Les quatre agresseurs ont été condamnés à de lourdes peines de prison en 2014 par la Cour d’assise de Liège, qui a retenu le caractère aggravant de l’homophobie dans le dossier.

Une affaire qui résonne encore aujourd’hui

Onze ans plus tard son père, Hassan Jarfi, témoigne dans les médias à l’occasion de la sortie du film Animals, qui raconte le calvaire qu’a subit son fils avant de mourir. Le combat de cet homme n’est pas récent. Ancien professeur de religion islamique à l’Athénée Royal Charles Rogier de Liège, mais aussi ancien responsable du département des mosquées pour la communauté arabophone de Wallonie, il met aujourd’hui sa spiritualité au service du combat contre l’homophobie. Dès le meurtre de son enfant, Hassan Jarfi déploie dans ses prises de paroles un discours éveillé et bienvenu. En 2013, un an après le tragique évènement donc, il publie un livre, « Ihsane Jarfi, le couloir du deuil  », dans lequel il confie sa colère et sa tristesse.

Dans une interview accordée au site MyEurop, en 2013, il explique le sens de son combat. « Je veux qu’on tire les leçons de ce qui est arrivé à mon fils. Qu’on dépasse les discours sur les discriminations. Le militantisme doit passer à l’offensif. Ce n’est pas suffisant de dire qu’on est contre l’homophobie en accusant, par-derrière, les Arabes ou les Juifs de tous les maux de la société. Il faut affirmer que toute discrimination est inacceptable ! Cet accident m’a catapulté sur le devant de la scène. Maintenant que j’y suis, je ne compte pas me taire. Je me suis tu lorsque mon fils était en vie. Ihsane lui-même a esquivé les questions sur son homosexualité par respect pour la famille et pour la communauté. Aujourd’hui, se taire, c’est être complice de l’homophobie. »

Une pensée affirmée et essentielle qu’Hassan Jarfi porte avec ténacité. Le 6 février 2014, date d’anniversaire d’Ihsane, son père crée une fondation au nom de son fils, la Fondation Ihsane Jarfi, afin de lutter contre l’homophobie et toutes autres formes de discriminations.

Ainsi, avec la sortie d’Animals,  Hassan Jarfi est revenu au micro de Konbini sur ses regrets en tant que père : « Pourquoi je ne l’ai jamais pris pour lui dire : « Viens mon gamin, Ihsane, je sais que tu es homosexuel, mais je m’en fiche ». Pourquoi je ne l’ai pas embrassé en lui disant ces choses-là ? », déplore t-il. Si Ihsane vivait toujours son homosexualité cachée, son père affirme avoir toujours su qu’il était gay : « Il me l’a dit à sa manière. Et puis entre vous et moi, pourquoi aurait-il besoin de me le dire. Je suis son papa, il m’aime, je l’aime. On dépasse toutes ces considérations ».

Quelques jours après le suicide du jeune Lucas et les mots émus de sa mère, les propos et le combat d’Hassan Jarfi résonnent d’autant plus.