Dans Libération, de nouveaux témoignages accablent la direction du Refuge

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Dans un article publié sur le site de Libération samedi 16 janvier, plusieurs personnes témoignent sur les dysfonctionnements au sein du Refuge. Les ex-employé.e.s ou bénévoles réclament le départ des deux dirigeants, Nicolas Noguier et Frédéric Gal.

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L'article de Libération recueille plusieurs témoignages d'ex-bénévoles du Refuge - Capture d'écran

Le 15 décembre 2020, Mediapart a publié une enquête accablante sur la direction de l’association Le Refuge. Sa gestion, ses méthodes de management, les relations avec les bénévoles, le comportement de ses dirigeants vis-à-vis des jeunes hébergé.e.s, sa trésorerie très confortable (un excédent de plus de 800 000 euros et une trésorerie de près de deux millions d’euros en 2019), tout avait été passé au crible dans cet article écrit par David Perrotin et Youen Tanguy, qui ont interrogé une cinquantaine de personnes, la plupart anonymes.

Dans un nouvel article publié sur Libération le 16 janvier, le journaliste Florian Bardou a recueilli de nouveaux témoignages sur le Refuge, d’ex-bénévoles, salarié.e.s et jeunes ayant collaboré avec l’association. Toutes et tous demandent la démission du président fondateur Nicolas Noguier et du directeur général Frédéric Gal.

L’association compte, parmi ses bénévoles, une trentaine de salarié.e.s ainsi que des travailleur.euse.s sociaux.ales. Ils et elles sont en charge de 187 places d’hébergement en France métropolitaine et dans les territoires d’outre-mer. Romain Ceccarini, ancien bénévole et ex-salarié de la délégation francilienne du Refuge, témoigne auprès de Florian Bardou du malaise qu’il a vécu lorsqu’il y travaillait.

« Du grand n’importe quoi »

«  Quand je suis devenu délégué régional, beaucoup de salariés, présents depuis des années, m’ont dit : “ Tu ne sais pas où tu mets les pieds ”. Et j’ai vite compris que c’était du grand n’importe quoi », explique-t-il. « Il fallait vivre pour l’association, j’étais sous pression et je recevais une centaine de mails par jour avec l’obligation d’y répondre sous 48 heures. Tout était fait à l’envers à ce moment-là et sans procédure. »

Fin décembre, Nicolas Noguier et Frédéric Gal ont annoncé leur mise en retrait temporaire du Refuge. Ils ont alors informé de la mise en place d’un audit interne, réalisé pendant le mois de janvier, par un cabinet public. Celui-ci concerne « la gouvernance, les finances, les relations avec les bénévoles et les jeunes accueilli.e.s  ».

« Peut-être que la mobilisation permanente des équipes n’a pas laissé assez de temps pour professionnaliser notre structure comme il l’aurait fallu. Peut-être ne sommes-nous pas encore assez formé.e.s sur les questions relatives à la transphobie », reconnaît la direction dans un communiqué.

« Tous ces dysfonctionnements étaient connus : on en discutait entre délégués », affirme à Libération Jean-Claude Manenc, un ancien adhérent à Avignon. « Ce sont des faits qui s’additionnent et, à force, ça explose ».

Sophie, une bénévole de la délégation de la Réunion, témoigne de sa surprise alors qu’elle s’est aperçue que les dysfonctionnements au sein du Refuge étaient généralisés. « On était vraiment impatients que l’affaire sorte ». « On a aussi découvert que ce qu’on a vécu l’a aussi été par d’autres bénévoles en France. Mais on est un peu frustrés car il y a eu peu de réactions des institutions »

« En 2019, trois jeunes que l’on suivait à la Réunion ont fait des tentatives de suicide et il n’y avait aucune procédure », confie-t-elle au quotidien français. « On s’est retrouvés à gérer ces situations alors qu’on est bénévole et sans aucun suivi psychologique. Le Refuge manque par ailleurs de travailleurs sociaux alors qu’il y a un gros travail d’accompagnement à faire : les jeunes méritent beaucoup mieux ».

« La fin d’une omerta » au Refuge

Le 7 janvier dernier, Romain Ceccarini se réjouissait au micro de France Bleu de « la fin d’une omerta, mais c’est surtout la libération de la parole et je l’espère un changement radical à venir dans la gestion de cette fondation ». « Ces pratiques n’ont jamais été dénoncées », déplore l’ex-bénévole. « On ne peut pas s’arrêter à un audit interne. Ce n’est pas possible. Si les choses ne changent pas, effectivement. Moi, je pense que nous serons nombreux à vouloir saisir la justice  ».

« Aussi louables soient les intentions affichées du Refuge, les révélations de Mediapart viennent confirmer des rumeurs inquiétantes qui bruissent depuis des années », écrit de son côté la Fédération LGBT dans un communiqué le 1er janvier. « Dès lors, elles brisent une atmosphère malsaine de complaisance silencieuse qui entoure cette structure  ».

Pour autant, les ancien.ne.s bénévoles ne renient pas le rôle du Refuge et ne souhaitent pas voir cette association disparaître. « C’est une association essentielle. On aimerait juste être écoutés : un audit internet n’est pas crédible », confie à Libération Yohann Allemand, à l’initiative du Collectif des anciens jeunes et bénévoles du Refuge.

Même son de cloche pour un ancien « correspondant relais » qui, sous couvert d’anonymat, explique qu’il « faut tout faire pour sauver le Refuge et c’est pour ça qu’il faut l’assainir : c’est une belle œuvre ».