3 questions à Laurence Rebouillon du Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris

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Le Collectif Jeune cinéma et le groupe What’s your flavor ? proposent notamment des performances, des rencontres et des focus cinéma ambitieux et excitants.

Image extraite de la bande-annonce du Festival des films différents et expérimentaux de Paris - Vimeo

La 21ème édition du Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris, organisé par le Collectif Jeune Cinéma, a ouvert ses portes mercredi 2 octobre et se poursuit jusqu’au 13 octobre dans plusieurs lieux parisiens. Le Collectif Jeune cinéma et le groupe What’s your flavor ? proposent notamment des performances, des rencontres et des focus cinéma ambitieux et excitants.

Afin d’évoquer une programmation riche et originale qui s’articule autour de la notion de création féminine, féministe et queer, Komitid a rencontré Laurence Rebouillon, productrice et réalisatrice, ancienne présidente et membre du collectif.

Komitid : Le thème majeur du Festival des films différents et expérimentaux de Paris cette année tourne autour des thématiques féminines, féministes et queer. Pourquoi ce choix ?

Laurence Rebouillon : Dans la démarche historique, le cinéma expérimental, c’est un cinéma qui parle des corps, en résistance, en transition, dissidents et qui se mettent en scène, monstrueux et fabuleux. C’est l’idée de parler de soi avec la caméra. Il y a 15 focus sur des sujets féministes d’aujourd’hui, de l’intersectionnalité au post-colonial avec des cinéastes d’Amérique latine, de Taïwan, ou Serbes, de l’ex-Yougoslavie. Le cinéma expérimental, à l’image du cinéma en général, a aussi été misogyne et homophobe, il a eu ses périodes. Ce n’est pas parce qu’il est marginalisé par rapport au cinéma commercial ou industriel qu’il est hors-société.

 

Et apparaît en figure de proue la cinéaste lesbienne récemment décédée Barbara Hammer …

Dans le film de Barbara Hammer Dykes, Camera, Action !, on voit que, quand les femmes lesbiennes se mettent à faire du cinéma, elles vont vers ce cinéma expérimental, à la fois marginal et libre, elles inventent. Hammer et d’autres ont inventé le cinéma lesbien à ce moment-là. Elle représente quelqu’un qui s’est revendiquée lesbienne et, dans les dernières années plus queer, pour avoir rencontré une génération nouvelle. Barbara Hammer est présente dans plusieurs des séances parce qu’elle a vraiment contribué au cinéma expérimental avec cette idée de prendre en charge nos propres récits, nos propres corps et de les mettre en jeu. C’est un peu la figure tutélaire de cette édition avec l’importance de « d’où on parle », d’un point de vue LGBT et aussi féministe, être une femme blanche occidentale, une femme noire aux États-Unis, ce sont des choses importantes à prendre en compte.

«  Barbara Hammer a vraiment contribué au cinéma expérimental avec cette idée de prendre en charge nos propres récits, nos propres corps et de les mettre en jeu. »

Quelles séances conseillez-vous particulièrement aux lecteur.rice.s de Komitid pour cette édition ?

La séance « Queer, Queen Women » qui ouvre le focus sur les cinéastes femmes, féministes et queers, le 8 octobre, rend hommage à des cinéastes décédés comme Agnès Varda, Chantal Akerman et Barbara Hammer et propose, dans la deuxième partie, une sorte de florilège des films reçus lors de l’appel à films What’s your flavor ? qui sont des films réalisés par des personnes qui s’identifient comme femmes ou femmes trans.

Pour le Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris, on reçoit toujours plus de films d’hommes mais on a découvert notamment un couple d’Américaines colombiennes, Amber Bemak et Nadia Granados, qui proposent une trilogie exubérante, délirante avec un travail qui se poursuit sur un certain temps. Elles sont ensemble à l’image, en tournage, et questionnent beaucoup la notion de frontières Mexique, États-Unis, Colombie avec une approche, pas forcément post-coloniale mais très actuelle. Cette séance va des « butchs » qui aiment beaucoup leurs seins au questionnement d’une Chinoise qui vit aux États-Unis et s’interroge sur son apparence fem et grosse, à un groupe de Suédois qui abordent une homoparentalité très queer et une personne trans F to M qui évoque son travail sur la voix avec un orthophoniste ou un professeur de chant.

Il y a également « Vers le débordement : poétique et politique(s) des liquides », un focus organisé par le collectif musique et cinéma expérimental de Marseille, Le MUFF, qui propose cette programmation sur les fluides avec l’idée de débordement, de nouvelles mythologies, l’instabilité et l’imprévisibilité du liquide. Et, enfin, la soirée de clôture, « Porn meets freaks + Deep Outside ». Là, on est sur du porn ou du post-porn avec une séance explicite et une performance de bruce.

« Queer, Queen Women » – Mardi 8 octobre – Le Grand Action
« Vers le débordement : poétique et politique(s) des liquides » – Jeudi 10 octobre – 20h – Le Grand Action
« Porn meets freaks + Deep Outside », Soirée de clôture – Dimanche 13 octobre – 20h – Le Grand Action

Toutes les infos et le programme complet du Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris est consultables sur le site cjcinema.org