Charlotte Bienaimé : « Des auditeurices me disent à quel point l'écoute solitaire du podcast provoquait réflexions, prises de conscience, parfois même, bouleversement dans leurs vies »

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« Un podcast à soi », qui traite des questions féministes, animé et réalisé tous les mois par Charlotte Bienaimé pour ARTE Radio se décline désormais en rencontres avec les auditeurs et auditrices. Explications.

« Un podcast à soi » Charlotte Bienaimé - ARTE Radio
« Un podcast à soi » Charlotte Bienaimé - ARTE Radio

Depuis septembre 2017,  Charlotte Bienaimé réalise pour ARTE Radio une émission mensuelle intitulée « Un podcast à soi ». Le succès de ce podcast révèle une soif de paroles, de rencontres et d’échanges autour des questions féministes. À partir du 3 octobre, « Un podcast à soi » se prolonge en « Un espace à soi », des séances mensuelles d’écoute collective qui se tiendront à l’espace FGO-Barbara, à Paris. Explications.

Komitid : Quels thèmes abordez-vous dans « Un podcast à soi », et à qui vous adressez-vous en priorité ?

Charlotte Bienaimé : Travail, sport, parentalité, sexualité.s, violences,  écologie, handicap, vieillesse, précarité… j’y aborde toutes les questions de société, au prisme du genre en mêlant documentaires et entretiens, récits intimes et paroles d’expert.e.s, textes inspirants et réflexions personnelles.
Récemment, j’ai donné la parole à des femmes en situation de handicap physique et à des femmes autistes. Elles racontent les discriminations qu’elles subissent dans une société sexiste et validiste ainsi que leurs luttes pour penser de nouvelles utopies. Charlotte Puiseux y expose aussi son travail sur la pensée Crip qui articule théorie queer et études sur le handicap.
« Il s’agit d’un espace de réflexion autour d’un enjeux de société majeur, qui permet de déconstruire les rapports de domination, dans une démarche intersectionnelle. »
Je suis actuellement en train de préparer deux épisodes autour des différents courants de pensées et luttes écoféministes. En abordant les  lutte en cours pour la défense de territoires en Occident et en Amérique latine, le rapport à la terre et aux plantes au sein d’une communauté de femmes dans les Pyrénées, le rapport à la spiritualité aussi, aux corps, à la maternité… Au fil de ce travail, j’interroge aussi mon propre rapport à ces questions, mes interrogations et mes contradictions.
Il s’agit d’un espace de réflexion autour d’un enjeu de société majeur, qui permet de déconstruire les rapports de domination, dans une démarche intersectionnelle. Je m’adresse donc à tou.te.s.
Charlotte Bienaimé

Charlotte Bienaimé

Dans le dernier épisode d’« Un podcast à soi », vous racontez de récentes rencontres avec des lesbiennes tunisiennes. Que vous ont appris ces femmes qui vivent dans un contexte particulièrement difficile ?

CB : J’ai réalisé de nombreuses émissions en Tunisie depuis la révolution. Les choses changent très vite. Si la communauté LGBTQi+ était déjà présente bien avant la révolution, de multiples associations ont été créées depuis. Même s’il est encore difficile pour beaucoup de Tunisiennes d’assumer leur lesbianisme, de nombreuses initiatives existent pour faire évoluer les mentalités.
Dans cet épisode, je fais entendre ainsi le travail réalisé par l’association Chouf qui a mis en place « Chouftouhonna », le festival d’art international féministe à Tunis, dont la dernière édition a eu lieu dans un quartier populaire de Tunis. L’idée est de créer un espace de rencontres, d’échanges et de débats autour de l’art et des féminismes, en réfléchissant sur l’espace public aussi. Comment faire en sorte que différents mondes se croisent, se parlent.
D’autre part, en plus de lutter contre la pénalisation de l’homosexualité, les lesbiennes tunisiennes s’organisent aussi pour être visibles dans le mouvement LGBTQi+ lui même. Certaines ont créé des associations sans hommes cis en ce sens.  Elles travaillent aussi à renouveler le féminisme tunisien porté jusque là par des associations féministes historiques peu investies sur les questions de sexualités. Elles revendiquent un féminisme intersectionnel et décolonial qu’elles souhaitent inventer, à leur image.

L’écoute d’un podcast est généralement un plaisir solitaire, mais vous avez décidé de prendre ce principe à contrepied en organisant des séances d’écoute collectives. Comment se déroulent-elles et qu’en attendez-vous ?

CB : Depuis deux ans, je reçois beaucoup de messages d’auditeurices me disant à quel point l’écoute solitaire du podcast était importante pour iels, à quel point elle provoquait réflexions, prises de conscience, parfois même, bouleversement dans leurs vies. Dans un mêmes temps, iels me disaient aussi qu’iels aimeraient partager ces émotions, ces pensées et interrogations à la suite de l’écoute. Beaucoup m’ont aussi dit que le podcast était devenu un outil pour lancer ensuite des discussions entre amis, à l’école ou à l’université.
« Un espace à soi »… afin de partager les émotions suscitées par l’écoute du podcast, les expériences personnelles auxquelles l’épisode fait écho »
Beaucoup de personnes me racontent également qu’elles ont parfois le sentiment de rester seules après une écoute. Qu’elles aimeraient partager. Tout cela m’a donné envie de mettre en place « Un espace à soi », tous les mois à FGO Barbara à Paris. Afin de partager les émotions suscitées par l’écoute du podcast, les expériences personnelles auxquelles l’épisode fait écho. Je pense que nous avons besoin aussi, au delà des réflexions théoriques, de partager cela, de l’assumer, pour saisir aussi toute la complexité des problématiques. Mais aussi pour comprendre et faire entendre nos contradictions personnelles, nos désaccords et réfléchir aussi, à nos propres réflexes de domination.

Pour écouter Charlotte Bienaimé

Écoutez « Un podcast à soi » sur le site d’ARTE Radio :
ou téléchargez les autres épisodes sur les principales plateformes d’écoute :
Premier rendez-vous « Un espace à soi », le 3 octobre, de 19h30 à 21h30, à FGO-Barbara, 1, rue Fleury, 75018 Paris
Rendez-vous suivants : jeudi 14/11 à 19h et jeudi 5/12 à 19h