« L’Œuf dure » de Rémi Lange, vrai-faux journal intime sur fond de désir d’enfant

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Où s'arrête le réel, où commence la fiction ? Le réalisateur Rémi Lange aime brouiller les pistes. Et encore plus dans son dernier film, « L'Œuf dure ». À voir !

Adriano Dafy et Rémi Lange dans « L'Œuf dure », de Rémi Lange - Destiny Films
Adriano Dafy et Rémi Lange dans « L'Œuf dure », de Rémi Lange - Destiny Films

Le réalisateur indépendant Rémi Lange revient, avec L’Œuf dure, son nouveau long métrage artisanal, à ses premières amours, le journal intime filmé, vint ans après Les Yeux brouillés qui avait succédé au cultissime Omelette (1997). Dans L’Œuf dure encore plus que dans ces deux opus fondateurs, Rémi Lange, qui perpétue la métaphore culinaire, n’en fait qu’à sa tête ! C’est bien pour cela qu’il est unique dans le paysage cinématographique français.

Voix faussement naïve

D’entrée de jeu, avec sa voix (off) faussement naïve, Lange raconte son installation à Marseille et ses déboires de réalisateur. Mixant éléments réels, professionnels et familiaux, et histoires fantasmées, il va se mettre en scène en anti-héros à la fois touchant et burlesque. Mais en ayant prévenu ses spectateurs en ouverture qu’on ne le verrait pas dans ce film car il ne se supportait plus physiquement !

Rémi est donc un réalisateur en stand-by, attendant désespérément la réponse d’une actrice célèbre afin de financer son prochain film avec une « vraie productrice ». Il décide d’organiser un casting dans son appartement marseillais pour dégoter le jeune homme qui doit incarner le rôle masculin de ce projet. Ces essais filmés, au passage la scène la plus hilarante du film, lui permet de rencontrer Dino (Adriano Dafy), un jeune artiste du coin. S’en suit une belle histoire d’amour romantique, alternant, avec un mélange d’ironie et d’idéalisme, discussions sur la vie de couple, ébats dans les criques au soleil couchant, et échanges artistiques entre les deux hommes. Mais quand Dino fait part de son désir d’enfant à Rémi, c’est un autre film qui s’amorce, à plus d’un titre.

Magali Le Nouar-Sabi, dans « L'Œuf dure », de Rémi Lange - Destiny Films

Magali Le Nouar-Sabi, dans « L’Œuf dure », de Rémi Lange – Destiny Films

Future progéniture

Les amoureux décident de « caster » une femme pour porter leur future progéniture et de faire de cette aventure le prochain film de Rémi. La deuxième partie met alors en scène Rémi et la volontaire, Magali.  Elle est interprétée par Magali Le Nouar-Saby, une actrice en fauteuil roulant, découverte en 2015 dans le grinçant et percutant Indésirables de Philippe Barassat. Ce dernier apparaît aussi dans le film dans son propre rôle comme de nombreux complices de Rémi Lange. Si cette partie aurait pu gagner en efficacité à être un peu raccourcie, les thématiques abordées sont d’une richesse vertigineuse et donnent lieu à des échanges d’une intimité crue.

Ce qui marque le plus à la vision de ce troisième journal filmé de Rémi Lange, c’est cet équilibre très personnel et paradoxal entre le jeu de rôles permanent, le brouillage des frontières entre le réel et la fiction et l’honnêteté implacable de la démarche. Qui d’autre que Rémi Lange pourrait aborder la flopée de sujets graves que le film explore avec à la fois une fantaisie si naturelle dans l’écriture et une mise en scène d’une si grande liberté ?

 

 

L’Œuf dure – 1h53
Réalisation : Rémi Lange
Distribution : Rémi Lange, Adriano Dafy, Magali Le Nouar-Saby, …
En salles le 28 août 2019