« Conséquences », « Together Alone », « La Femme de mon frère »… : les quatre films LGBT+ immanquables de la semaine

Publié le

Cette dernière semaine du mois de juin, dominé par les marches des fiertés, voit la sortie de quatre films LGBT+ à ne pas manquer !

Image extraite de « Conséquences », du réalisateur slovène Darko Stante - DR
Image extraite de « Conséquences », du réalisateur slovène Darko Stante - DR

Canicule + célébration des 50 ans de Stonewall = quatre recommandations cinéphiliques pour aborder cette fin de semaine dans la fraîcheur des salles climatisées. À l’affiche cette semaine : un film sur une maison de redressement pour jeunes délinquants en Slovénie, la reprise d’un chef-d’œuvre du cinéma queer américain des années 90, un documentaire sur une artiste trans brésilienne qui n’a pas sa langue dans sa poche et un portrait de jeune femme drôle et touchant venu du Québec.

Conséquences, un film choc sur la jeunesse slovène

Le réalisateur Darko Stante s’est beaucoup inspiré de son métier de tuteur dans un centre de redressement pour garçons mineurs pour réaliser Conséquences dans sa ville de Ljubljana, la capitale slovène. Le film suit le parcours d’Andrej qui va, après quelques écarts de conduite, se retrouver confronté à d’autres garçons au cœur d’un centre fermé de réinsertion. Là, il va apprendre beaucoup sur lui-même et sur ses désirs profonds ainsi que sur la difficulté de vivre sa vie dans un contexte et un pays qui contribuent à perpétuer une vision archaïque de la masculinité.

Naturaliste et débordant d’énergie, ce premier film dresse un état des lieux passionnant sans jamais verser dans l’analyse théorique mais en suivant de près les sentiments, les émotions, les moments d’abandon et les mensonges de ces garçons un peu perdus. Les acteurs, sélectionnés après des mois de répétition sans rôle attribués, sont tous extrêmement impressionnants. Geste de cinéma puissant, Conséquences est un film nécessaire qui permet, avec à la fois une grande simplicité et une extrême dureté, une prise de conscience de la difficulté de se sentir différent dans un pays comme la Slovénie.

Together Alone, reprise d’un chef-d’œuvre du cinéma queer américain

Ce film en noir et blanc réalisé en dix nuits et sorti en salles en 1991 est un bijou. Huis-clos entre deux jeunes hommes qui se rencontrent lors d’un coup d’un soir et qui prolongent le sexe par un dialogue d’une grande liberté, Together Alone capte ce moment presque magique pendant lequel les langues se délient et l’intimité se créé. C’est un des films indépendants américains incontournables du cinéma queer. Les échanges sans fard entre ces deux hommes sur leurs vécus, leurs visions de leur sexualité et de la façon dont ils envisagent de vivre leurs vies est d’un naturel confondant. Ce dialogue profond, écrit et mis en scène en pleine hécatombe du sida, n’a pas pris une ride par ce qu’il véhicule comme questionnements et comme doutes.

Il touche à des cordes extrêmement sensibles : la découverte de l’autre, la façon dont on se raconte soi-même, ce qu’on est capable de donner, de recevoir. Le film ressort dans une version remasterisée qui permet d’apprécier la profondeur de ses noirs et blancs très « nouvelle vague » et l’habile chorégraphie des corps, de leurs mouvements, dans cet espace restreint d’une chambre à coucher. Film existentiel et bouleversant, Together Alone est bien la preuve que dans un lit, on peut à la fois faire l’amour et refaire le monde, sa délicate partition de piano vous poursuivra longtemps.

Bixa Travesty, portrait de Linn da Quebrada, terroriste du genre

Documentaire brésilien saisissant, réalisé par Claudia Priscilla et Kiko Goifman, Bixa Travesty a remporté de nombreux prix lors de sa tournée des festivals (aux Teddy Awards de Berlin et au festival parisien Chéries Chéris notamment). Celle qui est au centre du film donne de sa personne sans compter. Linn da Quebrada, musicienne qui brasse les styles entre rap et funk, est une artiste trans engagée venue de la banlieue pauvre de Sao Paulo qui a débuté en bidouillant des sons avec sa « partner in crime », Jup do Bairro. À elles deux, elles enflamment les scènes du monde entier à commencer par celles de leur pays.

Portrait sans concession d’une artiste qui allie un sens du spectacle inné, une présence scénique incroyable et un discours politique construit, Bixa Travesty est un film en fusion qui dégage une énergie folle. Linn nous entraîne dans sa famille, dans son quotidien, et parvient à la fois à être une showgirl flamboyante, une militante affirmée et une enfant aimante. Les moments d’intimité filmés par ses proches, notamment lors de son séjour à l’hôpital, sont un mélange de journal très intime et de performance corporelle pleine de sens. Linn da Quebrada nous a affirmé en évoquant le film, dans l’entretien publié sur Komitid, « j’ai juste participé avec mon corps, et aussi avec mes idées ». En fait elle est le cœur de ce film, un cœur incandescent, révolté et d’une puissance hors-du-commun.

La Femme de mon frère, le SOS d’une trentenaire en détresse

Si le film n’aborde pas de sujets LGBT+, il y a quelque chose de fondamentalement queer dans le regard que porte Monia Chokri, découverte dans Les Amours imaginaires de Xavier Dolan en 2010, sur le monde d’aujourd’hui dans son premier film en tant que réalisatrice. La québécoise aime les décalages, les situations qui dérapent et fait preuve d’une réelle modernité dans son appréhension des relations entre les femmes et les hommes. Elle brosse le portrait d’une trentenaire au fond du gouffre, Sophia, doctorante sans emploi qui, faute de mieux, s’installe chez son frère. Mais, patatras, ce dernier tombe amoureux de la gynéco de sa sœur et le duo va perdre son équilibre fragile en devenant trio.

Le film aborde de nombreux sujets (la famille, les codes de la vie en société, les malaises du quotidien, la quête du grand amour) avec une délicatesse et un humour enivrants. Il faut dire qu’Anne-Elisabeth Bossé qui interprète Sophia (révélée dans les hilarants face caméra en mode faux-documentaire des Amours imaginaires) est une comédienne hors-catégorie : chaque mot, chaque expression, chaque regard nous donne envie de l’aimer et de devenir sa ou son BFF. L’alliage de charme maladroit et d’auto-apitoiement drolatique fonctionne à merveille. Coup d’essai réjouissant pour la néo-réalisatrice Monia Chokri ! (voir aussi son interview à Cannes)

  • phil86

    J’aimerais voir conséquences mais il est très mal distribué et je ne peux pas le voir dans ma région. Je dois aller courir à Tours pour pouvoir le voir. À quoi ça sert de faire des films que personne ne peut voir après ? J’attendrai la sortie DVD.