Mariage pour tous·tes : « L'histoire nous a donné raison », affirme Vincent Autin, le premier marié français

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« Bonheur et victoire », résume l'ancien militant de la cause LGBTQ+, aujourd'hui âgé de 50 ans et résident suisse, à l'évocation de ce 29 mai 2013.

Bruno Boileau et Vincent Autin le 29 mai 2013 - DR

« L’histoire nous a donné raison » : 10 ans après la loi autorisant le mariage pour tous en France, Vincent Autin, qui a ouvert le ban en épousant son compagnon Bruno à Montpellier (sud), estime « quasi impossible » un retour en arrière, même si les discriminations persistent.

« Bonheur et victoire », résume l’ancien militant de la cause LGBTQ+, aujourd’hui âgé de 50 ans et résident suisse, à l’évocation de ce 29 mai 2013. Ce jour là, il a dit “oui” à son partenaire de longue date, Bruno Boileau, à la mairie de Montpellier, lors d’une cérémonie historique et jazzy célébrant le premier mariage d’un couple de même sexe en France.

L’image de leur “baiser de l’hôtel de ville” avait fait le tour du monde. Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes du président socialiste François Hollande, était au premier rang des 350 invités, dont 200 proches. C’était elle qui, le 27 septembre 2012, lors d’un passage à Montpellier, avait proposé à Vincent et Bruno d’être les premiers gays mariés de France.

Leur union avait été rendue possible par une loi mettant en œuvre l’une des promesses de campagne de François Hollande, adoptée malgré l’opposition farouche des milieux conservateurs et catholiques réunis sous la bannière de la “Manif pour tous”.

« Je serais tenté de dire que personne ne reviendra sur le mariage pour tous, que pour les jeunes, c’est quelque-chose qui fait partie du décor, même si ce n’est pas toujours le cas pour les plus anciens et que l’on ne peut jamais jurer de rien », estime dix ans plus tard Vincent Autin, joint par téléphone.

« Il faut tout de même se souvenir de l’incroyable vague d’homophobie et de transphobie subie à l’époque », ajoute cet ancien dirigeant d’une association de défense des droits des LGBTQ+, pour qui le phénomène « n’a toujours pas été endigué ». Les discriminations et agressions homophobes ou transphobes restent « omniprésentes », accuse-t-il.

Sur le plan personnel, Vincent se souvient très bien du moment où cette idée de mariage a pris naissance : « C’est pendant l’entre-deux-tours (de la présidentielle 2012) que Bruno et moi avons décidé de nous marier si Hollande tenait sa promesse », raconte-t-il.

« Langue de bois »

Mais c’est un “concours de circonstances” qui a fait qu’ils sont devenus les deux premiers hommes à se marier officiellement en France, qui a franchi le pas 12 ans après les Pays-Bas et 10 ans après la Belgique.

« Ce qui fait que nous soyons devenus les premiers, c’est la réactivité de Montpellier et de sa maire socialiste, Hélène Mandroux. C’est la seule ville qui s’est préparée en amont, en modifiant notamment le programme informatique de l’État civil afin de pouvoir enregistrer deux hommes », se souvient-t-il.

Adoptée par l’Assemblée le 23 avril 2013, la loi avait été promulguée le 17 mai, journée mondiale de la lutte contre l’homophobie et la transphobie.

Dès le lendemain, Vincent et Bruno avaient été invités à en parler lors d’une matinale organisée par une chaîne d’information en continu sur le parvis de l’hôtel de ville de Montpellier.

« C’est pendant le direct que le journaliste de la télé nous a appris que la loi avait été publiée au Journal officiel et que, selon le calendrier légal, on pourrait donc se marier le 29 mai. À la mairie, ils ont immédiatement publié les bans. C’est comme ça que tout le monde a appris la date ».

Vincent Autin, aujourd’hui chargé des questions LGBTQ+ dans un grand syndicat suisse, souhaite voir s’appliquer plus sévèrement le code pénal, qui considère comme circonstance aggravante les discriminations et agressions fondées sur l’orientation sexuelle.

« Il y a aussi un ras-le-bol de la langue de bois pratiquée par les politiques, y compris chez les LGBT. Il ne suffit pas de venir aux parades des fiertés, il faut mettre les moyens pour de vraies politiques publiques » de prévention et d’éducation, plaide-t-il.

Après 12 ans se vie commune et sept ans de mariage, Vincent et Bruno ont souhaité « prendre chacun une route différente » et ont « divorcé amicalement en novembre 2020 », explique Vincent Autin. Sollicité, Bruno Boileau, qui vit dans l’Ouest de la France, n’a pas pu accorder d’entretien à l’AFP pour une raison de calendrier.