Dites bonjour à Volodimir Vilde, l'évêque orthodoxe ukrainien qui soutient les personnes LGBT+

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Que ce soit en Ukraine ou en Russie, les autorités chrétiennes orthodoxes ne sont pas connues pour être tendres avec les personnes LGBT+. La prise de position inhabituelle de cet évêque ukrainien suscite bien des espoirs.

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Cet évêque orthodoxe ukrainien s'exprime en soutien aux personnes LGBT+ - Depo.Ua / YouTube

C’est une première. Dans une interview vidéo accordée au site d’actualité ukrainien Depo.ua, Volodimir Vilde, évêque orthodoxe qui officie à Kiev, a tenu à exprimer son soutien aux personnes LGBT+. Choqué et attristé par le rejet des personnes queers par les institutions religieuses et les croyant.e.s, l’homme de foi s’était déjà fait remarquer par un puissant sermon inclusif sur la tolérance dès 2011, « inspiré par les églises occidentales ». Sept ans plus tard, il remet le couvert en vidéo pour clarifier sa posture à l’égard des personnes LGBT+ et de la sexualité en général.

« Dieu a créé les personnes LGBT+ », affirme-t-il pour expliquer que leur existence n’est pas synonyme de péché. « Le Seigneur a créé l’homme comme une unité physique et spirituelle, avec une double nature. Le Christ est devenu homme pour sauver l’humanité. Il ne sauve pas du péché, car ce n’est pas juste un aspect de l’humanité, mais toute sa nature. Et la sexualité en fait partie, c’est le dessein de Dieu, c’est ce qui a été créé par Dieu pour qu’une personne puisse montrer son amour, recevoir du plaisir dans une relation amoureuse. La sexualité est innée, les lois de la sexualité ont été créées par Dieu, pour le bien ».

Une lecture moderne de la Bible

Volodimir Vilke a ensuite rappelé que l’homosexualité n’était pas une maladie et que les personnes trans suivaient simplement leur propre chemin, remerciant la science pour les éclaircissements qu’elle a apporté au fil des siècles. L’évêque orthodoxe a ensuite pris le temps d’expliquer en quoi l’exemple de Sodome et Gomorrhe, qui sert souvent de base pour justifier les LGBTphobies chrétiennes, avait été mal interprété. « Sodome et Gomorrhe, ce n’est pas une histoire de sexualité, mais de cruauté », raconte-t-il. « C’était une grande ville commerçante dans laquelle vivaient des gens riches. Ils étaient inhospitaliers et l’un des principes de l’Ancien Testament était l’hospitalité pour les étrangers […] Ce que nous voyons à Sodome, c’est la pratique du viol de masse à des fins d’humiliation. Ce fût le cas avec différentes nations à différentes époques, mais violeur n’est pas synonyme d’homosexuel ».

Sur sa lancée, Volodimir Vilke n’a pas peur de répondre à la question provocatrice de la journaliste Valentina Yemіnova, qui demande s’il y a des personnes LGBT+ au sein même de l’église orthodoxe : « Il y a beaucoup de personnes ayant une orientation homosexuelle parmi les représentants du clergé ! Il est d’ailleurs difficile d’imaginer comment ils le vivent, car il n’est pas rare d’apprendre qu’une personne prêchant l’intolérance, appelant à attaquer les Prides, menait en fait une vie homosexuelle secrète ».

Une posture courageuse dans un contexte religieux réactionnaire

Des propos forts que les militant.e.s LGBT+ ukrainien.ne.s et russes ont repris avec enthousiasme sur les réseaux sociaux. Il faut dire que, cette même semaine, le métropolite de l’église orthodoxe russe, Grigori Alfeyev, a fait la déclaration suivante : « Nous assistons aujourd’hui à une accélération du processus de légalisation du vice et du péché en Europe. Si, au début, il était question de prostitution et d’avortement, on parle aujourd’hui de faire reconnaître par l’État les relations de même sexe, l’euthanasie et les transgenres  ».

Membre du Conseil panukrainien des associations religieuses, l’évêque n’a pas non plus peur de mouiller sa soutane pour exprimer son envie de voir différents cultes coexister en bonne entente dans la cité. Ses prises de position ne plaisent pas à tout le monde. Le religieux confie, en fin d’entretien, avoir reçu de nombreuses menaces, « notamment de la part des radicaux de droite », ce qui le pousse à ne pas annoncer ses prêches publiquement, et à passer par les réseaux sociaux pour s’exprimer, le plus souvent. Mais, décidément d’une bienveillance sans limites, il rationalise non sans un certain sarcasme : « Je suis sûr que parmi les jeunes de droite, il y a des personnes LGBT. À défaut de devoir les tolérer, pourquoi pas au moins les ignorer ? »