Roumanie : 3 questions pour tout comprendre au référendum controversé

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Dans moins de trois semaines, les 6 et 7 octobre, les Roumains et les Roumaines sont appelées à voter pour ou contre la modification de la définition de la famille dans la Constitution. Komitid fait le point.

Le Parlement roumain, à Bucarest - Takashi Images / Shutterstock
Le Parlement roumain, à Bucarest - Takashi Images / Shutterstock

Une famille roumaine ne peut-elle être que le fruit de l’union entre un homme et une femme ? C’est la question qui se joue dans le cadre du referendum organisé en Roumanie les 6 et 7 octobre prochains.

Mardi 11 septembre, les sénateurs et sénatrices du pays ont adopté à une large majorité l’organisation du scrutin. Moins d’une semaine plus tard, lundi 17 septembre, la Cour constitutionnelle a validé la tenue du referendum qui, s’il est approuvé, inscrirait dans la Constitution une définition très restreinte de la famille.

Komitid fait le point quant aux enjeux de cette consultation très controversée aussi bien dans le pays qu’à travers toute l’Europe.

Pourquoi un referendum ?

L’organisation de cette consultation, approuvée par le Sénat roumain, émane de la Coalition pour la famille (composée de 23 ONG) soutenue par l’Église orthodoxe, qui bénéficie d’une grande influence dans la société roumaine. La Constitution du pays définit actuellement la famille comme basée sur l’union entre deux « conjoints », mais cette situation n’est pas du goût de cette Coalition qui, dès 2015, s’est lancée dans la collecte de signatures. Trois ans et plus de trois millions de signatures plus tard, le gouvernement (Parti social-démocrate qui se définit comme de gauche) s’est décidé à l’organisation d’un referendum. Le but de la Coalition est donc d’inscrire dans la Constitution une nouvelle définition de la famille, basée sur l’union entre deux personnes de sexe différents.

Quelles conséquences si le « oui » l’emporte ?

Si les Roumains et Roumaines votaient majoritairement en faveur du « oui » à ce referendum, la définition actuellement neutre de la famille serait remplacée dans la Constitution. Exit la notion de simple « conjoints », la nouvelle définition voudrait que seuls les couples mariés de sexe différent soient reconnus comme base d’une famille. « Cela exclut de la protection constitutionnelle tous les autres formats de familles, c’est-à-dire non seulement les familles arc-en-ciel, mais aussi les grands-parents élevant des petits-enfants, les parents isolés (…) Cela en fait un problème familial plus large, non seulement un problème LGBTI, contrairement à ce que disent les auteurs du référendum », indique l’ILGA Europe.


Concernant le mariage pour tous les couples, il fait déjà l’objet d’une interdiction dans le pays : selon l’article 259 du Code civil roumain, le mariage correspond en effet à « l’union librement consentie entre un homme et une femme, conclue en vertu de la loi ». Il apparaît assez évident que si la définition de la famille voulue par les partisans du « oui » venait à être inscrite dans la Constitution, le projet d’ouvrir le mariage à tous les couples ne serait que plus difficile à mettre en place, comme Komitid vous l’a expliqué récemment.

Quelles sont les chances de le voir rejeté ?

« Ce référendum n’est pas dirigé contre des minorités sexuelles », a assuré la Première ministre Viorica Dancila. Pas assez pour étouffer la vive contestation autour de la consultation. Les opposant.e.s dénoncent un referendum qui risque d’encourager la discrimination à l’encontre des personnes LGBT+. « Ce référendum consiste essentiellement à demander aux gens d’approuver la discrimination contre leurs voisin.e.s, collègues, ami.e.s et membres de leur familleLes familles arc-en-ciel, les divers groupes familiaux, les familles aimantes vivant actuellement en Roumanie sont toutes menacées par cette proposition », s’alarme la directrice du plaidoyer d’ILGA-Europe, Katrin Hugendubel.


Face à ces constats, une mobilisation s’organise et les opposant.e.s appellent au boycott de la consultation. Car pour être valable, le référendum doit mobiliser une participation de minimum 30 %. Si ce taux est atteint, le « oui » a de grandes chances de l’emporter, la société roumaine étant encore très conservatrice. Le gouvernement a riposté en modifiant la loi pour que le referendum se tienne non pas sur un jour mais deux, allongeant de facto la possibilité de vote sur la durée. Suffisant ? Réponse début octobre.