Pour la réalisatrice de « Come As You Are », l'industrie du cinéma a encore peur des films LGBT+

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Desiree Akhavan, qui a réalisé l'excellent « Come as you are », s'est confiée à PinkNews sur la représentation des histoires queers au cinéma. Son constat est sans appel.

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Chloë Grace Moretz et Quinn Shephard dans « Come As you are » - Condor Distribution / Allociné

Come As You Are est indéniablement un des films LGBT+ qui a le plus marqué l’année 2018. Réalisé par Desiree Akhavan, le film suit Cameron, une adolescente contrainte de suivre un programme de conversion visant à la faire revenir dans le droit chemin de l’hétérosexualité. L’intrigue se déroule dans les années 90, mais reste très actuelle tant l’influence de ces « thérapies » reste puissante et provoque des ravages chez les jeunes LGBT+.

Une industrie « lâche » et un public « terrifié »

La réalisatrice, ouvertement bisexuelle, à qui l’on doit aussi Appropriate Behaviour, a répondu aux questions de PinkNews, notamment sur la difficulté de réaliser et de produire ses films : « Je crois que le pouvoir en place dans l’industrie du film est lâche. Les gens ne veulent pas prendre de risques avec un film queer, qui est centré sur une femme et qui est queer, et qui parle franchement de sexualité féminine. »

Desiree Akhavan estime que l’image d’une jeune femme forte qui connait sa sexualité et son corps est encore un tabou pour le public américain. Mais un film comme Come As You Are est aussi traité différemment en termes de promotion : « On a donné une importance et une estime à des films queers sur l’arrivée à l’âge adulte des jeunes hommes l’an dernier, avec Love, Simon et Call Me By Your Name. C’est aussi ce qu’il va arriver avec Boy Erased, mais pour certaines raisons, mon film n’a pas reçu le même soutien. » Boy Erased, qui sortira en France le 21 novembre, adapté des mémoires de Garrard Conley, raconte l’histoire d’un jeune gay, fils de pasteur, enrôlé dans un programme de conversion. Servi par un casting quatre étoiles avec Russell Crowe, Nicole Kidman, Troye Sivan et Xavier Dolan, le film est très attendu. Pour la réalisatrice, le public américain est encore « terrifié » par la sexualité des femmes. « Il y a quelque chose dans le fait de voir une femme s’approprier son corps et faire ce qu’elle veut de son corps qui reste profondément effrayant. »

« Une certaine dose de courage »

Avec Come As You Are, Desiree Akhavan évite le piège du manichéisme et, au contraire, montre le visage dangereusement humain de ceux et celles qui veulent le meilleur pour les jeunes LGBT+, à savoir les « soigner » de leur « déviance » : « Même si ce qu’ils font est terrible, personne ne veut faire du mal à ces enfants », analyse-t-elle. « C’est difficile de passer au-dessus de l’idée qu’on se fait de la vie en dehors de tout ce qu’on nous a appris, au-dessus de l’idée qu’on se fait de la réussite en dehors de la norme qu’on nous a inculqué. Cela demande une certaine dose de courage, de créativité et d’indépendance d’esprit pour imaginer une vie prospère pour son enfant homosexuel. »