Chiffrer le coût du sida pour améliorer la prévention, bienvenue à cynisme-land

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L'OIT a chiffré les pertes de revenus imputables au sida qui devraient encore atteindre 7,2 milliards de dollars en 2020. Puisque l'argent est le nerf de la guerre pour les décideurs et décideuses, ce chiffre fera-t-il électrochoc ?

L'Argent roi - 401(K) / Flickr
L'Argent roi - 401(K) / Flickr

L’Organisation Internationale du Travail (OIT) planche depuis de nombreuses années sur les conséquences de l’épidémie du sida, du point de vue économique. Si l’étude ne manque pas d’intérêt, pointant la gravité de la situation, il n’en demeure pas moins que le cynisme économique peut choquer. L’analyse permet à l’OIT d’appeler les autorités à déployer des efforts d’urgence afin de combler les lacunes en matière de traitement, et de mettre en place des mesures de dépistage et de prévention afin de garantir aux travailleurs et travailleuses une vie saine et productive.

En 2005, l’OIT avait déjà démontré que l’épidémie avait un coût pécuniaire pour les actifs et actives du monde. Elle avait calculé que 17 milliards de dollars en pertes de revenus étaient directement imputables au sida – résultant de la mort ou de l’incapacité à travailler.

Le dernier rapport, préparé conjointement avec l’Onusida, montre les évolutions tout en restant implacable

Les conclusions du rapport sont tirées selon plusieurs points particuliers : les pertes de revenu imputables soit au décès soit à l’incapacité totale de travail (la personne est hors de la main d’oeuvre), et celles imputables à une incapacité partielle de travail en raison des symptômes liés au sida, le temps de travail consacré aux soins, entre autres. Mais aussi les conséquences sur les activités du foyer : le temps de travail supplémentaire consacré aux tâches ménagères, effectué par les enfants, le nombre d’enfants dont l’éducation est entravée parce qu’ils vivent dans un foyer affecté par le sida.

Le dernier rapport, préparé conjointement avec l’Onusida, montre les évolutions tout en restant implacable. Ainsi, les salarié.e.s vivants avec le VIH peuvent de plus en plus continuer leur activité salariée. Si nombre d’actifs et d’actives vivant avec le VIH est passé de 22,5 millions en 2005 à 26,6 millions en 2015, les coûts, eux, ont tendance à baisser. En 2020, le rapport estime que 30 millions de salarié.e.s seront porteurs et porteuses du virus, mais que les pertes de revenus devraient atteindre 7,2 milliards de dollars.

« Les mesures de dépistage et de prévention du VIH doivent aussi être intensifiées si nous voulons mettre fin au sida. »

En 2020, le rapport estime que 140 000 enfants assumeraient des tâches supplémentaires (ce qui touche donc au travail des enfants) et 50 000 travailleurs et travailleuses équivalent.e.s temps plein supplémentaires devraient s’acquitter de travaux ménagers supplémentaires et non rémunérés.

« Le simple élargissement de l’accès aux traitements ne suffit pas. Les mesures de dépistage et de prévention du VIH doivent aussi être intensifiées si nous voulons mettre fin au sida. C’est l’évidence même sur le plan humain. Et c’est judicieux sur le plan économique », déclare Guy Ryder, le Directeur général de l’OIT.