« Montrer que l’on n’a pas peur d’exister en tant qu’avocat LGBT+ »

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Fondée récemment, l’Association française des avocats LGBT (AFALGBT) entend lutter contre les LGBTphobies au sein de la profession. Mais comment ? Florent Berdeaux, son co-président, s'explique.

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Florent Berdeaux, avocat au Barreau de Paris, est co-président de l’Association française des avocats LGBT (AFALGBT). L’association s’est lancée il y a quelques mois. Pour Komitid, il détaille son plan d’action.

La naissance de l’AFALGBT part d’un constat simple : aucun réseau de solidarité entre les avocats LGBT+ n’existait jusqu’à présent en France, alors qu’il y a un réel besoin de faire entendre la parole de toutes et tous sur ces questions-là. Il s’agit d’abord de construire un réseau d’entraide entre les confrères et les consœurs et notamment celles et ceux qui sont victimes d’isolement ou de discriminations dans l’exercice de leur métier. À cet égard, nous allons travailler en premier lieu à la rédaction d’une charte, à l’image de celle de l’Autre Cercle mais adaptée aux fonctions libérales.

« Faire évoluer les mentalités »

Ensuite, en présence de conflit entre un collaborateur ou une collaboratrice et son patron ou sa patronne, et si nous recevons le témoignage d’un confrère ou d’une consœur qui sollicite notre soutien, nous proposerons d’intervenir pour aider à résoudre la difficulté, notamment dans le cadre de procédures qui se dérouleraient devant l’Ordre saisi aux fins de conciliation, mais aussi dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Hors toute hypothèse de conflit, nous souhaitons aussi travailler avec le Conseil de l’Ordre de chaque barreau, afin de faire évoluer les mentalités, travailler à l’adoption de résolutions qui pourraient y aider, et peut-être faire évoluer notre règlement intérieur.

Un état des lieux national

Pour lutter contre les LGBTphobies, nous allons également procéder à un état des lieux national en recueillant des témoignages de confrères et de consœurs et ainsi être au fait des différentes situations problématiques. Au cours de ma carrière, il est arrivé que certains confrères me confient qu’au sein même de leur cabinet, l’homosexualité n’est pas un sujet dont ils pouvaient parler.

« Tu ne devrais pas parler de ça, tu ne devrais pas raconter tout ça dans le cadre de ce boulot »

Je n’ai personnellement jamais été victime de discriminations en raison de mon orientation sexuelle mais, à titre d’exemple, dans le cadre de mon premier stage, alors que je venais de me séparer de mon copain après six ans de relation, j’en ai parlé pendant un déjeuner. Mon maître de stage est venu me voir et m’a averti : « Tu ne devrais pas parler de ça, tu ne devrais pas raconter tout ça dans le cadre de ce boulot ».

La profession a beau se vouloir moderne , le côté « tradi » est encore très présent. Il faut faire attention à ce qu’on dit et on sait qu’il y a plein de confrères et consœurs qui ne racontent pas leur weekend ou qui usent de périphrases pour ne rien révéler de leur orientation sexuelle. Il y a encore un tabou envers les patron.ne.s, les client.e.s et les pairs plus âgés qui pourraient voir ça d’un œil différent.

Être visibles, montrer que l’on existe

Pour répondre et améliorer cette situation, il s’agit pour nous, et comme dans tous les domaines, d’œuvrer pour une meilleure visibilité des personnes LGBT+. Montrer que l’on existe et que l’on n’a pas peur d’exister en tant qu’avocat LGBT+, cela va beaucoup aider à libérer la parole. Il faut aussi montrer que la clientèle hétérosexuelle ne fuit pas un cabinet parce que l’avocat est LGBT+.

Enfin, il est par ailleurs très important que l’AFALGBT soit identifiée comme une institution de spécialistes capables d’intervenir sur le fond des questions liées aux droits des personnes LGBT et qu’elle puisse participer à leur évolution.

Retrouvez l’Association française des avocats LGBT (AFALGBT) sur Facebook, Twitter et leur site internet

Propos recueillis par Philippe Peyre.