Affaire Christophe Girard : des élues et féministes au tribunal

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Six féministes, dont l'élue écologiste Alice Coffin, doivent répondre à partir de jeudi devant le tribunal correctionnel de la capitale de diffamation et d'injure publique envers Christophe Girard, ex-adjoint de la maire de Paris Anne Hidalgo.

christophe girard
Christophe Girard - Yann Caradec / Flickr

Ces cinq femmes et cet homme dénoncent une « procédure-bâillon » destinée à faire taire celles et ceux qui dénoncent les violences sexistes et sexuelles.

De son côté, Christophe Girard, 68 ans, affirme à l’AFP défendre par cette plainte « l’Etat de droit ».

Les faits remontent au 23 juillet 2020. Une vingtaine de militants et élus féministes manifestent devant l’Hôtel de ville de Paris pour réclamer la démission du maire-adjoint, dénonçant ses liens avec l’écrivain Gabriel Matzneff, accusé de pédocriminalité.

« Mairie de Paris, bienvenue à pedoland », « Girard à la culture ? HLM, prix, pension, honneur pour les pedos » : pancartes et slogans créent une vive controverse.

Tout juste reconduit à son poste d’adjoint à la culture d’Anne Hidalgo, Christophe Girard démissionne. L’édile, elle, annonce saisir la justice pour injures publiques.

M. Girard a porté plainte contre les élues écologistes Alice Coffin et Raphaëlle Rémy-Leleu, membres de la majorité municipale, la journaliste Coline Clavaud-Mégevand, Céline Piques de l’association Osez le féminisme, Alix Béranger du collectif la Barbe et le militant Morgan Jasienski.

Tous sont poursuivis pour diffamation et/ou injure sur un citoyen chargé d’un mandat public pour avoir publié ou republié sur Twitter (devenu X) des propos ou des photos de ces banderoles.

« On jugeait indigne que Christophe Girard soit adjoint à la culture de la maire de Paris », déclare à l’AFP Raphaëlle Rémy-Leleu, poursuivie pour diffamation. « On essaye encore de nous faire payer le fait d’avoir parlé ».

Pour son avocate Me Elodie Tuaillon-Hibon, Christophe Girard n’était pas « expressément » visé par ces slogans, « c’était plutôt les choix politiques de la ville de Paris ».

« Rubicon de la loi »

« Quand vous voyez écrit que vous êtes un soutien ou un complice de la pédocriminalité et un adjoint à la culture du viol, non seulement les bras vous en tombent mais vous êtes sidéré », confie à l’AFP Christophe Girard, élu du 18e arrondissement de la capitale, qui assure n’avoir eu d’autres choix que de porter plainte.

Cet ancien militant de la lutte contre le sida attend des « explications » devant la « violence » devenue selon lui « une pratique politique pour certaines et certains ».

Pour Me Clara Gandin, avocate d’Alice Coffin, les propos ne visaient pas directement M. Girard en tant qu’élu.

En mars 2020, il avait été entendu comme témoin dans l’affaire Matzneff, notamment en qualité d’ancien secrétaire général de la Maison Yves Saint Laurent entre 1986 et 1987, structure dirigée par Pierre Bergé, qui a apporté un soutien financier à l’écrivain.

L’avocate de Mme Coffin, poursuivie pour des retweets, défend des propos qui sont « l’expression d’opinions politiques, militantes » et des allégations couvertes par « la bonne foi », dans le contexte d’un débat d’intérêt général : la lutte contre la pédocriminalité.

Au contraire, l’avocate de la partie civile, Me Delphine Meillet, affirme qu’« au nom d’une cause juste, on est allé trop loin, beaucoup trop loin, en termes de liberté d’expression. On a passé le Rubicon de la loi ».

« Sur le banc des accusés ce seront des élues et militantes féministes attaquées par Christophe Girard, qui est défendu par la même avocate que Roman Polanski », réalisateur accusé de viols et d’agressions sexuelles, a déclaré Alice Coffin dans une vidéo sur son compte X.

La journaliste y affirme également que « l’affaire Girard » lui avait valu « des milliers d’attaques, de menaces de mort, de viols, d’insultes », et que ses plaintes « n’ont jamais abouti ».

Christophe Girard avait par ailleurs été visé par des accusations de viol, sans lien avec l’affaire Matzneff. Mais l’enquête avait été classée sans suite en 2020 en raison de la prescription des faits.

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