Vincent, en couple avec Cylvain, séropositif au VIH : « Je me suis approprié son infection. C’était vital pour moi »

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Cylvain et Vincent sont en couple depuis plus de quatorze ans. En 2011, Cylvain a appris qu’il était séropositif au VIH. Comment le couple s’est reconstruit autour de l’infection ? Comment l’amour a-t-il été plus fort que la peur et les doutes ? Rencontre.

Illustration Silver pour Komitid

Cylvain et Vincent sont en couple depuis plus de quatorze ans. En 2011, Cylvain a appris qu’il était séropositif au VIH. Comment le couple s’est reconstruit autour de l’infection ? Comment l’amour a-t-il été plus fort que la peur et les doutes ? Rencontre.

Komitid : Parlez-nous de vous ?

Cylvain : J’ai 43 ans. Je suis séropo depuis 2011. Après avoir été aide-soignant pendant 10 ans et avoir vécu une expérience difficile avec le monde médical, j’ai décidé de changer de vie et je suis styliste aujourd’hui. Et je vis en couple avec Vincent depuis plus de quatorze ans. 

Vincent : J’ai 38 ans. Je suis séronégatif. Je travaille dans l’administration. Tu as oublié de dire qu’on s’est marié en 2017…

Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Cylvain : Nous nous sommes rencontrés dans un sauna à Lyon. Je n’allais pas très bien… Je venais de me séparer de mon ex. Je cherchais plus de la tendresse que du sexe.

Vincent : Moi, j’étais en pleine dépression après des problèmes familiaux. Je viens d’une famille plutôt traditionnelle.

Cylvain : J’ai l’habitude de dire qu’on n’était, à l’époque, pas mis en lumière et que notre rencontre a été un moment clé de nos vies, elle les a éclairées…

Racontez-nous la séroconversion de Cylvain…

Cylvain : On a quitté Lyon en 2010. On a très vite déchanté du rêve parisien : on habitait un rez-de-chaussée. On était loin de ce qu’on imaginait de la vie dans la capitale. Je travaillais à l’époque dans un service d’oncologie dans une clinique. Le travail était difficile. J’étais très fatigué. Trop peut-être…

Vincent : Je m’inquiétais. On a consulté des médecins qui mettaient la faiblesse de Cylvain sur le compte d’une dépression liée au déménagement et à la difficulté de son boulot.

Cylvain : Un an plus tôt, j’avais eu une grippe non expliquée et j’avais fait un test VIH qui s’est avéré négatif. J’ai oublié de le confirmer par un autre test… J’ai vécu cette fatigue extrême pendant six mois.

Vincent : Une docteure a alors demandé à Cylvain de faire un test VIH. Il s’est avéré positif.

Quel était votre état d’esprit à ce moment-là ?

Cylvain : En quelques secondes, je suis devenu « mortel ».

Vincent : Vers Noël, Cylvain a fait un malaise. Il se vidait littéralement. J’ai appelé les pompiers. Il a été hospitalisé deux semaines. 

Cylvain : Un infectiologue nous a dit que ma charge virale était à 1,4 millions de copies. Je venais d’apprendre que j’étais séropositif et en plus, on me disait que j’étais en stade sida. Il y avait une suspicion de tuberculose…

Vincent : J’ai su très vite, à cause de l’urgence de la situation, qu’il nous faudrait faire le dos rond et être patient. J’étais très inquiet parce qu’on vivait un truc étrange : Cylvain ne pouvait pas commencer les antirétroviraux tant qu’on n’avait pas soigné les maladies opportunistes. Mais au bout de deux ou trois mois, j’ai commencé à être rassuré. Surtout quand je voyais Cylvain se battre contre les infections.

Cylvain : Je me suis rendu compte que Vincent n’allait pas me quitter. Il m’a montré qu’on était deux dans cette épreuve et ça m’a donné de la force. On vivait une vraie épreuve de couple. Je n’arrêtais pas de me dire : « Que va devenir Vincent si je meurs ? » 

Vincent : J’ai fait un test VIH tout de suite et j’ai appris que j’étais séronégatif.

Quand avez-vous découvert le TasP  ?

Cylvain : Un an après mon hospitalisation, ma charge virale est devenue indétectable. Dès mes premières analyses, on n’a parlé que de ça. Avant d’être concerné, la notion de charge virale indétectable ne nous parlait pas…

Vincent : J’ai voulu très vite assister aux consultations de Cylvain. C’est moi qui posais le plus de questions. On avait des rendez-vous de 20 minutes qui duraient une heure tant je voulais tout savoir. Je me suis approprié son infection. C’était vital pour moi.

Qu’est-ce que ça a changé dans votre vie ?

Cylvain : D’abord, je me suis dit que je n’allais pas mourir demain. Je me suis rendu compte que les traitements étaient très efficaces. Ensuite, j’ai intégré le fait qu’avec ma charge virale indétectable, je ne pouvais plus transmettre le VIH. En fait, je vis une vie normale.

Vincent : On a intégré la charge virale indétectable de Cylvain dans notre vie de tous les jours : on a le même rasoir ! Le VIH n’impacte pas notre vie.

Cylvain : Mon seul boulot est de prendre mon traitement. Vincent, lui, s’est occupé de la gestion de notre vie de couple pendant toute cette période. Il a pris en main le matériel… Être en couple a vraiment été extraordinaire.

Au niveau de votre sexualité ?

Cylvain : Ma libido est revenue peu de temps avant que ma charge virale ne soit indétectable. Nous avons donc tout naturellement réintégré la capote à notre sexualité.

Vincent : Après, ça a été la « Fête du slip » ! (rires) Comme nous sommes un couple ouvert, j’ai décidé de prendre la PrEP à la demande pour mes plans en dehors de mon couple. Aujourd’hui, nous avons une sexualité on ne peut plus normale…

Cylvain : Même si nous n’avons aucun tabou !

Avez-vous des projets ?

Vincent : On ne veut pas d’enfants si c’est que tu veux savoir… (rires) J’ai convaincu Cylvain. On veut juste continuer à être amoureux, à être heureux.

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