Supporters : entre dialogue et banissement, des politiques diverses dans les stades européens

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Contre l'homophobie, le racisme, la violence, les réponses ne sont pas toujours similaires d'un pays à l'autre.

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Les nouveaux débordements lors du match Lyon-Marseille dimanche 21 novembre ont surpris dans les autres grands championnats européens, où les politiques de lutte contre les débordements diffèrent, avec des interdictions de stade plus longues en Espagne, en Italie et en Angleterre, tandis que l’Allemagne a opté pour le dialogue et l’accompagnement.

 

En Angleterre, lutte anti-hooliganisme

En dépit de l’histoire chargée en matière de hooliganisme du football anglais, les débordements dans les stades sont devenus très rares, grâce à une politique active du gouvernement britannique fondée, entre autres, sur les interdictions de stade.

Elles peuvent être prononcées par un tribunal pour une durée de deux à dix ans, soit cinq ans de plus que la durée maximale d’interdiction judiciaire de stade en France, qui impose toutefois un pointage des supporters concernés chaque jour de match au commissariat.

Au 1er août, il y avait 1.359 interdictions de stade en vigueur en Angleterre et au pays de Galles, toutes divisions confondues, chiffre régulièrement en baisse au cours des dix dernières années.

Les clubs peuvent aussi décider d’interdire à un supporter l’entrée dans leur stade ou la participation à toute activité organisée par le club. En France, les interdictions commerciales de stade ne sont possibles que depuis 2016, avec la loi Larrivé.

Dans son règlement intérieur, le club de Tottenham prévoit des sanctions en cas d’intrusion sur l’aire de jeu, de possession d’engins pyrotechniques, de jets de projectiles ou de comportements racistes ou homophobes jusqu’au bannissement à vie.

« Une légende urbaine », selon Me Pierre Barthélémy, avocat qui défend des associations de supporters. « Il y a systématiquement un effet d’annonce des clubs, mais juridiquement ça n’a pas de suite. »

En Allemagne, la prévention

L’Allemagne, également fortement touchée par la violence dans les années 80 et 90, s’appuie depuis plus de vingt ans sur une politique de prévention, et non de répression. La concertation permanente entre autorités et associations de supporters, ainsi que les « Fanprojekte » (mise en place d’actions pédagogiques concrètes) ont permis d’éviter depuis des incidents comme ceux à Lyon.

« Ils ont mis en place des dialogues avec des associations de supporters, relève Nicolas Hourcade, sociologue à l’École centrale de Lyon et spécialiste des supporters. L’enseignement des politiques étrangères est que ça nécessite une politique globale venant du sommet de l’Etat et définissant le rôle de chacun. »

La Bundesliga n’est toutefois pas épargnée par quelques saluts nazis ou injures racistes : les clubs fournissent alors les vidéos de surveillance à la police, et les auteurs de délits sont poursuivis pénalement chaque fois qu’ils sont identifiés. Plusieurs ont été interdits de stade.

Mais aucun match de première division n’a jamais été disputé à huis clos pour des motifs disciplinaires, ni aucun point retiré. « Ils s’en sont sortis en écartant des stades les fauteurs de troubles, beaucoup plus qu’en infligeant des matches à huis clos », conclut Nicolas Hourcade.

Italie et Espagne : la loi des cinq ans

En Italie, l’interdiction de stade, décidée par le préfet, peut s’étendre jusqu’à cinq ans en vertu d’une loi introduite en 1989.

Exceptionnellement, les clubs peuvent aussi se voir infliger des matches à huis clos, comme ce fut le cas en 2007 à Catane, après la mort d’un policier lors des affrontements liés au derby sicilien contre Palerme.

Dans son arsenal répressif, l’Espagne prévoit aussi jusqu’à cinq ans d’interdiction de stade pour les supporters, mais aussi la fermeture d’un stade pendant deux ans.

Les clubs sont par ailleurs sommés de retirer le carnet de socio (supporter-actionnaire), qui a une grande portée symbolique en Espagne, à toute personne sanctionnée dans le cadre de cette loi.

À l’issue d’une réunion mercredi 23 novembre entre les ministres de l’Intérieur, des Sports et de la Justice avec les instances du foot français, Gérald Darmanin annonce… une nouvelle réunion dans 15 jours pour décider quoi faire.

Avec l’AFP