Aux États-Unis, offensive conservatrice contre les jeunes trans

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Sur les terrains de foot, dans les vestiaires, et jusque dans leurs traitements médicaux, les jeunes trans sont devenu·es la nouvelle cible des conservateur·trices américain·es, par le biais de dizaines de projets de loi.

drapeau trans
Le drapeau trans - Ink Drop / Shutterstock

«  On essaye de me dicter comment vivre ma vie  », dénonce Dylan Brandt, 15 ans. Avant de faire sa transition, cet adolescent de l’Arkansas, État rural et très religieux du sud des États-Unis, s’est forcé, durant des années et contre son gré, à paraître « aussi féminin que possible ».

« J’étais malheureux  », confie à l’AFP Dylan, qui a décidé à 13 ans de faire sa transition. Après un an et demi de rendez-vous chez des psychologues et médecins, il a commencé il y a huit mois à prendre un traitement à base de testostérone. Résultat instantané : « Je suis beaucoup plus heureux, j’ai beaucoup plus confiance en moi. Je me suis fait plein de nouveaux amis  », sourit le garçon, blond aux yeux bleus, qui a relaté en vidéo sur TikTok sa mue notamment vocale.

Mais en raison d’une loi votée mardi, Dylan pourrait ne bientôt plus avoir accès à son traitement hormonal. L’Arkansas est devenu le premier État américain à interdire aux mineur·es l’accès à des transitions médicales.

Les défenseur·es de ce projet de loi assurent vouloir « protéger les enfants vulnérables  » d’« expérimentations » médicales.

« Argument électoral »

« Dans un État conservateur comme celui-ci, il est difficile de penser que la politique n’y est pas pour quelque chose  », juge la mère de Dylan, Joanna Brandt, qui voit plutôt là des motivations électorales.

« Je pense que pendant très longtemps, attaquer les gays et les lesbiennes était un argument électoral très efficace pour les responsables politiques  », ajoute Jordan Ruud, à la tête d’une ONG locale de défense des personnes LGBTI+, le River Valley Equality Center. Avec la légalisation du mariage pour tou·tes, « c’est devenu moins acceptable socialement » et les efforts se sont tournés vers les personnes trans, constate-t-il.

Le gouverneur républicain de l’Arkansas, Asa Hutchinson, qui s’était opposé en vain au projet de loi de son État, a estimé que le texte était le fruit de la « guerre culturelle » qui divise actuellement les États-Unis.

Dans cette bataille, les conservateur·trices ont fait du sujet des traitements médicaux, mais aussi du sport, leurs armes de choix : des projets de loi ont été déposés dans plus d’une vingtaine d’États, afin d’interdire aux enfants et adolescent·es trans de concourir dans des compétitions scolaires féminines. Leur raisonnement : il est injuste d’opposer des sportives à des personnes susceptibles d’être plus grandes, plus fortes et plus rapides.

«  Quel entraîneur voudrait prendre une fille dans son équipe, si son record peut être battu par quelqu’un qui est né homme ?  », lançait Donald Trump lors de son premier discours d’ex-président, en février. Pas si simple. « Au niveau élite, les championnats du monde, les compétitions olympiques… les sportives transgenres ne remportent pas plus » de médailles, balaie Eric Vilain, expert auprès du Comité international olympique.

« Il y a énormément de facteurs qui entrent dans la fabrique d’un athlète  », détaille le professeur de génétique humaine, à l’AFP. « Une athlète transgenre qui va faire du basket sera en moyenne plus grande donc ça peut être un avantage, mais en gymnastique elle sera peut-être trop grande ».

Le président américain Joe Biden s’est positionné sur le sujet, promulguant au premier jour de son mandat un décret visant à « prévenir et combattre les discriminations sur la base de l’identité de genre ou l’orientation sexuelle ».

Les militant·es trans assurent aussi qu’il est discriminatoire et extrêmement blessant de priver leurs athlètes d’épreuves sportives, et de s’ingérer dans leur parcours médical. Argument qui a le soutien de nombreuses associations féministes mais aussi de stars du sport, comme la footballeuse Megan Rapinoe.

« Ce sont juste des enfants, gentils et courageux, qui veulent qu’on les laisse tranquilles », martèle Joanna Brandt.

Avec l’AFP