« Days », chef d’œuvre queer inédit à voir sur Arte replay

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« Days », du réalisateur taïwanais Tsai Ming-Liang est un film particulier qui requiert patience et engagement de la part de celui ou celle qui le regarde.

Anong Houngheuangsy et Lee Kang-sheng dans « Days », du réalisateur taïwanais Tsai Ming-Liang - Arte

Récompensé en mars dernier par le prix du jury des Teddy Awards lors de sa présentation en compétition officielle au festival de Berlin, Days, le nouveau film du taïwanais Tsai Ming-Liang est une ode à la lenteur mais surtout un catalyseur d’émotions. Une rencontre entre deux hommes, entre deux solitudes. Une merveille qui se mérite.

Fine ligne narrative

Suivre la longue journée de Kang et de Non, deux hommes d’âge et de condition différente, assister à leur rencontre lors d’un massage, d’une prestation sexuelle, et les suivre après, un peu. Voilà la fine ligne narrative de Days, un film particulier qui requiert patience et engagement de la part de celui ou celle qui le regarde. Un film quasi muet mais très sonore qui fait la part belle aux bruits de la nature, de la ville, aux sons du quotidien.

Days, ce sont d’abord des plans longs et quasi fixes, au cadre très construit, qui racontent d’une part le parcours de soins médicaux de Kang (interprété par le comédien fétiche du réalisateur Lee Kang-Sheng qui a inspiré le personnage). Kang vit dans une grande maison et fait face à la souffrance physique. Il parcourt les rues de Bangkok pour se soigner. D’autre part, on suit le quotidien de Non, qui lave et épluche des légumes dans son petit appartement pour préparer minutieusement des plats traditionnels qui le relient à ses racines villageoises. Les scènes prennent leur temps, jouent d’une durée immersive, installent une certaine langueur.

La patience devant la lenteur et la durée des scènes et l’abandon à ce rythme particulier presque hypnotique seront récompensés par une montée d’émotion incomparable.

Hypnotique

Ce film est fondamentalement conçu pour être vu dans une salle de cinéma, sans possible échappatoire, mais, comme il est visible sur le service replay d’Arte (il n’a malheureusement pas trouvé de distributeur pour une exploitation en salles en France), il faut se mettre en condition, il faut s’accrocher, ne pas être distrait, éteindre à tout prix son téléphone, tamiser l’éclairage, se mettre en condition pour deux heures d’immersion. C’est à ce prix, grâce à ces efforts que la magie opère. La patience devant la lenteur et la durée des scènes et l’abandon à ce rythme particulier presque hypnotique seront récompensés par une montée d’émotion incomparable. 

Si le sujet du film, c’est bien la solitude de l’être humain dans les grandes villes, ici à Bangkok, et la force de la rencontre, du contact des corps, d’une caresse, avec Days opère également une démonstration de la puissance du cinéma, de celle incomparable des choix esthétiques et de la composition des plans, de la force du récit, de la scène, du montage, du son et de la façon dont tout cela concourt à créer chez les spectateur.rice.s la réflexion, la divagation, l’agacement, l’empathie, le sourire et les larmes. 

La dernière scène, elle aussi simple, lente et belle, concentre toutes les émotions que le film distille et offre à Days son point culminant. Days est un chef d’œuvre qui se mérite. 

Days
Réalisation : Tsai Ming-Liang

Distribution : Lee Kang-Sheng et Anong Houngheuangsy
Durée : 2h07
Disponible sur le site d’Arte jusqu’au 29 octobre 2020 

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