Avec « La Chambre de l'araignée », Mohammed Abdelnabi signe un roman puissant sur la vie des gays en Égypte

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« La Chambre de l'araignée » est un des premiers romans égyptiens dans lequel les principaux protagonistes sont gays. Une étape nouvelle pour les personnes LGBT+ ? Entretien avec l'auteur Mohammed Abdelnabi.

Mohammed Abdelnabi, auteur de « La Chambre de l'araignée, à Paris, le 16 avril 2019 - Xavier Héraud pour Komitid
Mohammed Abdelnabi, auteur de « La Chambre de l'araignée, à Paris, le 16 avril 2019 - Xavier Héraud pour Komitid
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Pour quelques jours à Paris, mi avril, Mohammed Abdelnabi enchaîne les débats, les interviews et les séances photos, signe que son second roman, La Chambre de l'araignée, suscite beaucoup d'intérêt. Cette plongée au cœur de la vie gay cairote possède une force magnétique rare et Mohammed Abdelnabi excelle dans la description de ces personnages homosexuels. Notre entretien avec le jeune auteur égyptien, qui vit dans un village près du Caire, a lieu le lendemain de l'incendie de Notre-Dame et Mohammed Abdelnabi, dont c'est le premier séjour à Paris, se dit très attristé par la vision de la cathédrale en flammes.

L'affaire du Queen Boat

Dans La Chambre de l'araignée, c'est un quotidien bien sombre que révèle l'auteur car l'action du livre se situe au moment où éclate l'affaire dite du Queen Boat. Nous sommes le 11 mai 2001 quand la police fait une descente sur un bateau-boîte de nuit, le Queen Boat, amarré sur le Nil, au Caire. Cinquante deux hommes sont arrêtés, emprisonnés et selon plusieurs rapports d'organismes internationaux, battus régulièrement et soumis à des examens pour « prouver leur homosexualité ». À l'issue de deux procès et malgré la réprobation de nombreux pays, vingt-deux hommes ont écopé de peines de prison de trois ans et vingt-neuf autres furent acquittés. Cette affaire a marqué durablement les esprits et elle est décrite par certaines des victimes elles-mêmes dans le roman de Mohammed Abdelnabi. La Chambre de l'araignée suit en particulier le parcours de Hani Mahfouz, qui essaie de se construire en tant qu'homosexuel dans une société qui le réprouve. Il croisera des personnages hauts en couleur, tel « le prince », figure paternelle qui veille sur ses « chéris ». Mohammed Abdelnabi nous a reçu pour une longue interview sur ce roman qui fait déjà date, car c'est sans doute la première fois dans la littérature arabe contemporaine qu'une intrigue – avec de belles scènes de tendresse et de sexe –, tourne entièrement autour de personnages gays, qui sont les principaux protagonistes de l'histoire.

Komitid : Comment avez-vous travaillé pour obtenir des informations concernant l'affaire dite du Queen Boat ?

Mohammed Abdelnabi : J'ai beaucoup lu, notamment les rapports de Human Rights Watch (HRW), en anglais et en arabe. Je voulais avoir tous les détails. J'ai également regardé de nombreuses vidéos sur Youtube avec les interviews de certaines des victimes qui avaient réussi à fuir le pays. J'ai fait cette recherche avant de commencer l'écriture.

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