Pinkwashing : Nike se vante d'utiliser le triangle rose

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Dans la famille « je ne sais pas ce qu'indécence veut dire », je demande la marque de chaussures, casquettes de sport et autres éléments de sportswear.

Un sneaker de la collection Nike 2018 “Be True”
Un sneaker de la collection Nike 2018 “Be True”

Depuis le 6 juin, début du mois des fiertés outre-Atlantique, on peut s’acheter sur le site américain Nike des chaussures, tee-shirts et casquettes de la collection BETRUE 2018. Des affaires (très chères) aux couleurs de la lutte pour les droits LGBT+.

Aucune honte

C’est joli le violet non ? « La lavande, un mélange dynamique de couleurs genrées entre le bleu léger et le rose léger, est l’une des références symboliques les plus anciennes de la culture LGBTQ. La teinte apparaît en quatre variations dans la collection de chaussures de cette année (…). La connotation historique de cette couleur a précédé la grande popularité du symbole arc-en-ciel des années 70, qui est apparu sur les vêtements comme un langage discret reliant dans la communauté. » Sur le triangle rose, la marque n’hésite pas à y aller à fond : « également mis en avant dans notre collection, le triangle rose. Une forme qui a un passé complexe dans la culture LGBTQ. À l’origine, elle identifiait les individus LGBTQ pendant la seconde guerre mondiale (sic), puis le triangle a été récupéré dans les années 70 par les activistes pro-gay puis adopté plus tard par Act Up dans leur campagne mémorable des années 80, “Silence = Mort” ».

Il est rare que le propos des marques expliquant les mécanismes de la récupération des symboles soit si clairement expliqué. C’est sans doute parce que le propos précède un petit encadré qui montre que la marque va verser une petite partie de ses profits liés à la collection BETRUE 2018, à une association. Une petite partie… plutôt une microscopique partie.

« Depuis 2012, Nike a offert près de de 2,7 millions de dollars d’aides financière et de support de tout ordre aux causes LGBTQ, pour faire avancer l’inclusion et célébrer la passion et le sport de tous les athlètes. Nous sommes impatient.e.s d’annoncer les associations qui recevront bientôt notre aide en 2018, à travers le fond BETRUE ». En 2017, Nike a fait 15 milliards de revenus, rien qu’en Amérique du Nord. Merci, donc, pour cette demi-cacahuète.

Act Up New York dénonce le pinkwashing

Interpelée sur Twitter par un jeune designer militant, Richard Wade Morgan, l’association Act Up New York est tombée des nues, rappelant à nouveau sur Twitter que « les entreprises privées n’ont pas l’autorité de s’approprier l’imagerie de résistance queer, seule la communauté le peut ».

Plusieurs membres ont rencontré des représentants de Nike pour leur expliquer ce que le concept d’appropriation signifie. On leur aurait répondu qu’il « faudrait des mois pour satisfaire leur demandes ».


L’association a également rapporté, sur Twitter toujours, que toutes les marques ne font pas n’importe quoi : «  nous ne disons pas que nous possédons le symbole, nous disons que les entreprises ne doivent pas faire du profit sur les vies des personnes queer sans partager ce profit avec elles. Levis nous a donné toutes ses vestes “Silence = Mort” afin que nous les vendions et en tirions notre propre profit ».

Le militant Jason Rosenberg a également expliqué au site Mic que « la marchandisation progressive de la Pride est un problème que nous  voyons poindre depuis une décennie et même au delà. Nous avons vu de plus en plus de compagnies et d’institutions participer aux Pride, même si des rapports montrent que certaines d’entres elles pratiquent de la discrimination à l’embauche pour les personnes LGBTQIA+, et qu’elles ont un fort manque de représentativité dans les espaces de travail. »

Ce samedi, pour la marche des fiertés à Paris, le mot d’ordre du contre-cortège de tête sera « Stop au Pinkwashing ».