Les député·es russes votent une loi bannissant "la propagande" LGBT+

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Les député·es russes ont adopté jeudi des amendements qui élargissent considérablement le champ d'application d'une loi interdisant la "propagande" LGBT+, en plein virage conservateur du Kremlin.

Façade de la Douma, à Moscou, en Russie - Sergei Sokolnikov / Shutterstock
Façade de la Douma, à Moscou, en Russie - Sergei Sokolnikov / Shutterstock

Mise à jour, 25 novembre, à 14 h.

Les député·es russes ont adopté jeudi des amendements qui élargissent considérablement le champ d’application d’une loi interdisant la “propagande” LGBT+, en plein virage conservateur du Kremlin accompagnant son offensive militaire en Ukraine.

“Promouvoir les relations sexuelles non-traditionnelles est interdit (…) Cette solution va protéger nos enfants et l’avenir de ce pays contre les ténèbres répandues par les Etats-Unis et les pays européens”, a déclaré dans un communiqué le chef de la chambre basse du Parlement (Douma), Viatcheslav Volodine.

Cette nouvelle loi, qui est une version augmentée d’un texte très décrié de 2013 bannissant la “propagande” LGBT+ auprès des mineurs, interdit désormais de “faire la promotion de relations sexuelles non traditionnelles” auprès de tous les publics, dans les médias, sur Internet, dans les livres et dans les films.

Ce vaste champ d’application, ainsi que la large interprétation permise par le concept vague de “promotion” font craindre une répression accrue envers les communautés LGBT+ en Russie, qui font déjà l’objet d’une forte discrimination.

” Une interdiction de la promotion de la pédophilie et du changement de genre a également été introduite”, a également déclaré dans son communiqué le chef de la chambre basse du Parlement.

“Les amendes s’élèvent à 10 millions de roubles” (environ 160.000 euros) pour les contrevenants, a-t-il ajouté.

« Nous existons »

La militante Dilia Gafourova appelle les autorités russes à ne pas utiliser la communauté LGBT+ comme un “instrument de la confrontation idéologique”.

“Nous existons tout simplement, et il n’y a rien de mauvais en nous et rien qui doit être passé sous silence”, souligne-t-elle. “On ne peut pas nous priver de notre voix”.

Le mois dernier, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits humains, Volker Türk, avait jugé “profondément” préoccupant le durcissement de la loi sur les LGBT+ en Russie, après un vote de la Douma sur le texte en première lecture.

La principale ONG russe de défense des minorités sexuelles, LGBT-Set, avait pour sa part dénoncé le 18 octobre dans cette loi une “nouvelle tentative de discrimination et d’atteinte à la dignité de la communauté LGBT”.

Lors des premières discussions publiques sur ce projet législatif LGBTphobe, Konstantin Malofeïev, milliardaire et magnat des médias connu pour ses prises de position ultra-conservatrices avait déclaré : “La propagande de la sodomie est véritablement au cœur de l’influence de notre ennemi”.

Tournant conservateur

La Russie n’a cessé de renforcer son tournant conservateur ces dernières années face à ce que Vladimir Poutine présente comme la “décadence” de la société occidentale. Ce virage s’est encore plus renforcé depuis le début de l’offensive russe en Ukraine.

Le gouvernement a ainsi introduit une nouvelle matière à l’école : les “conversations sur ce qui est important”, destinées à promouvoir le patriotisme.

Outre les personnes LGBT+, cette loi préoccupe également les acteurs du cinéma et de la littérature, qui craignent un renforcement d’une censure déjà très forte. Le roman culte Lolita, de Vladimir Nabokov, pourrait par exemple être interdit.

“La vente de biens contenant des informations interdites” sera désormais bannie et “les films qui font la promotion de relations (“non traditionnelles”, ndlr) ne recevront pas de certificat de distribution”, selon le site de la Douma.