Turquie : le procès de l'ONG féministe We Will Stop Feminicide renvoyé à l'automne

Publié le

Un procureur d'Istanbul avait décidé en avril de poursuivre la plateforme We Will Stop Feminicide et de demander sa dissolution pour "activités contre la loi et la morale".

Le drapeau de la Turquie
Le drapeau de la Turquie - sefayildirim / Shutterstock

Le procès de l’une des principales et des plus actives associations de défense des droits des femmes de Turquie, accusée d’activités “immorales”, a été ajourné jusqu’en octobre, peu après son ouverture mercredi 1er juin, a constaté l’AFP.

La prochaine audience se tiendra le 5 octobre.

Un procureur d’Istanbul a décidé en avril de poursuivre la plateforme We Will Stop Feminicide et de demander sa dissolution pour “activités contre la loi et la morale”.

Pour Nursel Inal, une des responsables de la plateforme fondée en 2010, il s’agit d’un procès politique.

“Il y a un mouvement de femmes très organisé en Turquie et nous pensons que ce procès est une attaque envers la lutte des femmes pour leurs droits”, a-t-elle déclaré à l’AFP peu avant l’audience.

Des dizaines de femmes s’étaient rassemblées devant le tribunal pour manifester leur soutien : “Tu ne seras jamais seule !”, “Nous allons mettre fin aux féminicides !” ont-elles lancé en agitant des bannières violettes, la couleur du mouvement féministe en Turquie.

A l’origine du procès, des plaintes déposées par des particuliers qui reprochaient aux membres de l’association de “détruire la famille au prétexte de défense des droits des femmes”.

La plateforme tient notamment le compte et publie régulièrement des rapports sur les meurtres de femmes.

L’association a aussi organisé plusieurs manifestations pour le maintien de la Turquie dans la Convention d’Istanbul, un traité international établissant le cadre légal et institutionnel de la lutte contre les violences sexistes, dont le pays s’est retiré en 2021.

Le gouvernement turc a justifié sa décision d’abandonner le traité en lui reprochant d’encourager l’homosexualité et de menacer la structure familiale traditionnelle.

Selon la plateforme, 160 femmes ont été tuées les six premiers mois de 2022 en Turquie, dont la majorité par des membres de leur famille.

Le décompte des victimes de féminicide l’an dernier s’est élevé à 423.

Rien qu’en avril de cette année, le décompte s’est élevé à 20 femmes tuées selon l’association.

“Nous sommes sous la pression du gouvernement parce que nous rendons visible chaque féminicide, en publiant un par un les noms des femmes tuées”, a estimé Mme Inal.

“Nos rapports contredisent le gouvernement qui prétend que le nombre de féminicides est en baisse”.

Plus de 300 avocats de toute la Turquie ont proposé leurs services pour défendre la plateforme. L’une d’elle, Aysun Kilic, du barreau de Kocaeli (nord-ouest), a rendu hommage au travail de comptage accompli par la plateforme en estimant que c’était normalement “le devoir de l’Etat”.