Beauvais : la Grande mosquée visée par une fermeture de six mois pour « apologie du jihad »

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Selon l'arrêté préfectoral, l'imam appelle aussi « à la haine, à la discrimination de certaines catégories de personnes, tels que les juifs, les chrétiens, ou les homosexuels ».

Une vue de Beauvais - Henryk Sadura / Shutterstock

La préfecture de l’Oise a ordonné la fermeture pour six mois de la Grande mosquée de Beauvais en raison de la radicalité des prêches donnés par un imam faisant notamment « l’apologie du jihad », une décision déjà contestée en justice par ses responsables.

« La préfète de l’Oise a pris un arrêté lundi portant sur la fermeture de la Grande mosquée de Beauvais pour une durée de six mois. Cet arrêté est exécutoire au bout de 48 heures », a précisé la préfecture. Ce lieu de culte accueille quelque 400 fidèles, selon la préfecture.

L’avocat de l’association Espoir et Fraternité, qui gère cette mosquée, Me Samim Bolaky, a annoncé à l’AFP avoir saisi le tribunal administratif d’Amiens d’un référé liberté contre cette décision. Une audience doit avoir lieu dans les 48 heures, selon l’avocat.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait annoncé le 14 décembre avoir « enclenché » la procédure de fermeture administrative de cette mosquée, l’accusant, sur CNews, d’attaquer le « modèle républicain et la France », en raison de la radicalité des prêches d’un imam.

Les prêches de cet imam « présenté comme intervenant occasionnel », mais « en réalité imam régulier de la Grande mosquée de Beauvais », peut-on lire dans l’arrêté dont l’AFP a obtenu copie, « valorisent le djihad en tant que “ devoir ” en glorifiant les combattants qu’il qualifie de +héros+, au service de la protection de la religion musulmane qui serait selon lui menacée par les sociétés occidentales ».

Selon cet arrêté, les prêches de cet officiant « défendent une pratique rigoriste et radicale de l’Islam et la supériorité des règles religieuses sur celle du droit positif à l’égard desquelles il légitime la désobéissance ».

Ces propos encouragent les « fidèles au repli identitaire » et les « incitent à rompre avec la République », allant « jusqu’à ériger les non-musulmans en ennemis ». L’imam appelle aussi « à la haine, à la discrimination de certaines catégories de personnes, tels que les juifs, les chrétiens, ou les homosexuels ».

« Prévenir la commission d’actes de terrorisme »

La préfecture reproche aux responsables de la mosquée de ne pas avoir condamné ces propos diffusés sur les réseaux sociaux, l’un d’eux ayant même selon elle relayé les publications de l’imam sur son compte Facebook.

La préfecture estime que « compte tenu de la prégnance de la menace terroriste à un niveau très élevé », il y a lieu de « prononcer la fermeture du lieu de culte (…) pour une durée de six mois, dans le but de prévenir la commission d’actes de terrorisme ».

L’association Espoir et Fraternité a « toujours combattu le terrorisme, a toujours favorisé le vivre ensemble », avait défendu le 14 décembre Me Samim Bolaky, fustigeant une mise en cause « disproportionnée » car « l’intégralité des reproches » sont liés « à l’imam bénévole et non pas à l’association et à la mosquée ». L’avocat avait alors affirmé que l’imam avait été suspendu.

« L’imam était nouveau, 8-10 mois qu’il était là », avait indiqué à l’AFP Mohamed, un fidèle de la mosquée, installée au sein d’anciens bureaux près du centre-ville, en attendant l’achèvement de la construction de la nouvelle Grande mosquée quelques mètres plus loin.

Selon le ministère de l’Intérieur, 2 623 mosquées et salles de prières sont établies sur le territoire national et parmi ces lieux de culte, « 99 étaient soupçonnés de séparatisme ». Tous ont « été contrôlés au cours de ces derniers mois ».

« Pour 36 lieux de culte, les contrôles ont permis de démontrer que la loi de la République y était strictement respectée, par exemple à la suite d’un changement d’imam ou de gouvernance associative », a indiqué le ministère.

En outre, « 21 lieux de culte sont actuellement fermés, du fait de prescriptions administratives, d’une décision judiciaire, d’une reprise de bail, de travaux ou d’une fermeture administrative ». Outre la mosquée de Beauvais, cinq « font l’objet d’une instruction qui permettra d’engager une fermeture, notamment sur la base de la loi séparatisme ».