Lalla Kowska-Régnier : « Les droits LGBT, ça ne fait pas toujours sens quand on s'inscrit dans le point de vue d'une femme qui négocie avec l’hétérosexualité »

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En cette fin d'année, nous avons eu envie d'entendre une voix singulière. Celle de Lalla Kowska-Régnier, longtemps activiste contre le sida dans les années 90 puis journaliste à la télévision puis militante trans visible, avant de prendre du champ ces dix dernières années.

Lalla Kowska-Régnier, à Paris, en juin 2021 - Xavier Héraud pour Komitid
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Pour bien terminer cette année, marquée par une accélération des mesures en faveur des personnes LGBT (élection oblige ?) avec notamment l'adoption de la PMA et l'interdiction des thérapies de conversion, nous avons eu envie d'entendre une voix singulière. Celle de Lalla Kowska-Régnier, longtemps activiste contre le sida dans les années 90 puis journaliste à la télévision puis militante trans visible, avant de prendre du champ ces dix dernières années. Dans un entretien réalisé il y a quelques semaines, nous lui avons demandé de revenir sur certains termes usités dans la communauté et qu'elle critique (LGBT, queer) mais aussi de nous dire ce qu'elle pense des TERFS, des combats actuels, du passing et de beaucoup d'autres choses. Une interview en profondeur d'une personnalité un peu à part et qui ne verse pas, mais alors pas du tout, dans le « prêt-à-penser ». Ce qui en fait bien sûr tout son intérêt.

Komitid : Qu'est-ce que tu fais en ce moment ?

Lalla Kowska-Régnier : En ce moment,  j’expérimente une approche autour des métiers du bar. L'idée c’est d’intégrer la réduction des risques au cœur de l’activité des débits de boissons. Après avoir testé le dispositif dans un petit bar près du métro Arts et Métiers, on propose maintenant des formations.

 

J'ai regardé cette vidéo de ton travail à Canal Plus. On se dit déjà que cette chaîne a bien changé, non ? Est-ce que tu regardes encore Canal ?

T'as vu ? Moi aussi j’ai  bien changé !  Et non. Je ne regarde plus. Le clair est mort depuis longtemps. Je regarde juste quelques séries.

Mais est ce que tu la regardes comme un bon souvenir de ce que tu as fait?

Quand je disais que j‘ai bien changé en réalité ce n’est pas moi que je vois là, c'est JC mon frère jumeau dissipé. Je dis ça parce que c’est important pour moi que les gens qui liront ces quelques lignes soient informées que mon  « je »  est riche d’un.e autre. Et donc oui, ça été exceptionnel de pouvoir y entrer, de participer à des événements importants. La première « Nuit Gay » par exemple. J’ai rejoint Canal en janvier 1995, après une rencontre avec les équipes de Canal pendant le premier Sidaction un an plus tôt. J’étais alors vice-président com d’Act Up-Paris quand toi tu étais président. C'était pour travailler sur  la toute première « Nuit Gay » avec l’équipe des programmes courts. Ensuite j'ai pu rejoindre les équipes de la « Grande Famille ».  Et puis, petit à petit, comme ça, je suis devenue assistant réal puis documentariste, puis responsable d'édition, puis à la programmation, puis journaliste. Puis les petites chroniques « alternatives » autour des thématiques qui m’importaient.

Est-ce que tu envisagerais de refaire de la télé ?

Des fois, j'y pense… et puis j’oublie ! J'ai eu la chance de bosser sur des émissions en direct. Canal+, c'était quand même un truc très luxueux. J'ai pu toucher à tout dans le métier de la production audiovisuelle. D’ailleurs je crois que j’étais pas plus appropriée à l’époque, je me souviens des discussions au moment de mon passage à l’antenne où je refusais d’être le « chroniqueur gay » . On avait opté pour alternatif mais ça ne parlait pas aux publicitaires. J’imagine que j’y travaillerai encore si ça avait été le cas. Et je ne suis pas plus adaptée à la demande des diffuseurs, trop de carrefours aux intersections, et rien de très visible et donc de marketable.

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