« Queer as fourche » : à la rencontre des nouveaux ruraux LGBTI+

Publié le

Pour de nombreuses personnes LGBTI+, vivre à la campagne peut être perçue comme une difficulté. Komitid est parti à la rencontre de celles et ceux qui ont choisi de s'éloigner de la ville et de construire une nouvelle vie queer. Pas toujours simple.

Virgile prend la route pour aller à L'Aqueerium, cafe queer et féministe, à Caen, en février 2020 - Teresa Suárez Zapater pour Komitid
Article Prémium

Le train file vers Marseille. Ensuite, il faudra prendre un TER puis un bus. L’idée de rentrer dans mon village d’enfance m’angoisse. J’y ai ma famille et encore des amis. Ses maisons, d'où l'on aperçoit le Garlaban, décorent nombre de mes meilleurs souvenirs. Je suis enthousiaste. Angoissé aussi. Ici, l'hétérosexualité écrase ma vie queer tant elle est omniprésente.

Je n’ai pas souvenir, au collège puis au lycée, d’y avoir croisé une personne LGBTI+ – c’était l’année avant le mariage pour tou·tes. Mon groupe d'amis d’enfance, aussi progressistes soient-ils, restent résolument hétéros. Au quotidien, je ne suis pas le plus flamboyant. Reste qu'avec eux je me réduis. Pas de maquillage, pas de grands récits sur la beauté des lieux queers, pas d’échanges tardifs sur mes amours parisiens.

Ce n’est pas que l'invisibilisation. C’est le manque. De la complicité des regards et des rires partagés. De se sentir exister et appartenir. 

Beaucoup de LGBTI+ n’ayant pas grandi dans les grandes villes connaissent cette angoisse. Un terrifiant retour à la norme et la porte du placard qui se referme au moins un peu – accentuée, sans doute, par la période qui nous tient si loin les un.e.s des autres. À la campagne, dans les petites villes, là où les réseaux affinitaires se construisent autour de la famille et où nos communautés sont invisibles, se dire puis grandir comme LGBTI+ relevait, pour moi comme pour d’autres, du défi. 

 

Paradoxe de la norme

Virgile, iel, a trouvé loin de la ville un lieu où s'épanouir. Sa voiture serpente sur les petites routes normandes. À gauche des champs et des vaches, à droite la campagne et les bovins. Teresa, la photographe qui m’accompagne, et moi-même voulions de la verdure. Nous voilà servi·es. Notre idée est simple : aller à la rencontre d’adelphes LGBTI+ ayant décidé de faire leur vie en dehors des grandes métropoles, qu’ils ne l’aient jamais quitté ou choisi d’y revenir. Pour prendre, pour ma part, mes clichés dans la gueule.

Pour continuer la lecture de cet article :

Vous avez déjà un accès ?

Identifiez-vous