« S'il suffisait qu'on s'aime » et « L'été du vertige » : deux BD lesbiennes pour passer l'hiver

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De l'adolescence à la PMA, voici deux bandes dessinées qui explorent des vécus lesbiens avec grâce et intelligence, de la découverte de soi à l'affirmation de son identité.

« L’été du vertige », d’Adlynn Fischer

Louise, adolescente épuisée par les injonctions qui lui sont faites depuis toute petite, en a assez d’être sage. Alors que son père la laisse une semaine avec sa petite soeur pour un voyage d’affaire, c’est l’occasion pour Louise de goûter brièvement à une vie qu’elle a toujours eu envie de mener, une vie sans barrières ni interdits.

De ce postulat classique, Adlynn Fischer crée un coming-of-age incandescent, où Louise écoute finalement le feu qui brûle en elle pour s’émanciper brillamment. A l’occasion d’une rencontre avec Aurora, jeune inconnue qui passe la semaine avec elle, l’adolescente décide de faire fi de tout ce qui lui a été imposé à ce jour.

Dans cette BD, Adlynn Fischer ne parle pas du lesbianisme que comme une orientation sexuelle, mais aussi comme un moyen d’imaginer le monde autrement, sans les hommes, sans contrôle sur autrui. Elle décrit un monde où la seule personne qui choisit, c’est nous même. Une réflexion galvanisante qui, dans l’esprit de Louise, prends tout son sens.

Graphiquement aussi, « L’été du vertige » est une franche réussite. Ses aplats de couleurs mouvants, passant sans cesse du chaud au froid, donnent aux dessins épurés une dimension insaisissable, bouillonnante, illustrant à merveille la tempête intérieure de Louise. Une belle ode à l’indépendance, pour que n’oublions jamais le pouvoir que prodigue la désobéissance.

« L’été du vertige », d’Adlynn Fischer, La ville brûle, 232 p., 22 €

« S’il suffisait qu’on s’aime », de Daphné & Julie Guillot

Là où « L’été du vertige » se concentre sur un bref moment de l’adolescence de son héroïne, « S’il suffisait qu’on s’aime » fait le portrait plus vaste d’une période s’étalant sur plusieurs années, plus précisément de 2013 à nos jours.

Alors que la loi sur le mariage pour tous vient d’être voté, Daphné et Julie Guillot, les autrices, se rencontrent lors d’une Pride. Commence alors une longue et belle histoire d’amour, enchevêtrée de questionnements sur la maternité, le féminisme, et le combat pour la PMA. Outre l’histoire d’amour entre les deux femmes, la réelle idée de la BD est de faire la chronique de ces années de débats interminables et anxiogènes autour de la Procréation Médicalement Assistée. L’ouvrage, dense et riche en information, est un superbe recueil sur le militantisme féministe, qu’il soit ancien ou plus récent, et sur les interrogations de celles qui le vivent au quotidien.

Que signifie être mère ? Que signifie le vouloir ou non ? Que signifie devoir se battre pour le devenir ? « S’il suffisait qu’on s’aime » répond plus ou moins à ces questions existentielles sans jamais délaisser ses deux personnages, toujours guidés par un espoir palpable malgré l’épuisement et les obstacles.

« S’il suffisait qu’on s’aime », de Daphné & Julie Guillot, Steinkis, 291 p., 25 €

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